REALITE
DE LA MENACE TERRORISTE
EN EUROPE DE L’OUEST

On en sait un peu plus sur la réalité et le caractère pakistano-européen de la menace qui actionne l'ensemble des services de renseignements pakistanais et occidentaux et met en émoi les opinions publiques européennes.

On sait aujourd'hui que les attentats en préparation visaient, entre autres, Notre-Dame de Paris et un grand magasin en France, ainsi que l'hôtel Adlon, la tour de télévision de l'Alexenderplatz et la gare de Berlin. On peut même ajouter que des éléments encore plus précis quant à cette menace en terme de localisation sont connus du BKA allemand et de la DCRI.

Ces actions terroristes auraient à nouveau, comme pour les attentats du 11 septembre, eu pour centre de gravité Hambourg et en particulier l'ancienne mosquée Al Qods devenue mosquée Taïba que les autorités allemandes ont fermé le 9 août.

Le BKA y a dénombré 45 membres du Djihad islamique. En Allemagne actuellement 131 personnes sont classifiées comme « terroristes potentiels ». Ces personnes sont identifiées comme « politiquement motivés à commettre des actes (terroristes) considérables ». Dans leur proche environnement gravitent 278 personnes « importantes » pouvant être, par exemple, des commanditaires, des apporteurs d’aide financière ou des fournisseurs d’hébergement. 352 enquêtes sont actuellement ouvertes contre des suspects de terreur islamiste par le Ministère public fédéral. 119 procédures concernent une activité criminelle en Afghanistan et au Pakistan. 220 individus, convertis et immigrés ayant ou non la nationalité allemande, ayant reçu un enseignement paramilitaire sont répertoriés en Allemagne. Pour 70 d’entre eux, existent des preuves concrètes qu'ils ont terminé une formation dans des camps spécialisés dans l’action terroriste. 40 ont l'expérience du combat en Afghanistan.

107 de ces personnes sont actuellement en Allemagne, dix d'entre elles se trouvant en détention.

Au centre de l'organisation logistique et de recrutement se trouverait Nouamane (Naâmane) Meziche qui avait déjà résidé en Allemagne de1992 à 1996, s'y était marié et est père de deux enfants. Né à Paris le 18 juin 1970, il a la double nationalité algérienne et française.Naâmane
Meziche avait quitté l'Algérie en 1992 après l'interruption des élections législatives par les militaires. Son père Mouloud Meziche a été arrêté le 13 mars 1995, son frère Rouched le 1er mai 1995, tous deux par des agents du DRS et ont disparu depuis. Un autre frère, Tarek, qui avait rejoint un groupe armé, a été abattu lors d'un accrochage avec des militaires en 1996. Le 5 janvier 2006, en provenance de Frankfort, il est arrêté par la police des frontières à l'aéroport Houari Boumediène à Alger, conduit
au commissariat de police à Ben Aknoun et transféré aux services du DRS (Département du renseignement et de la sécurité) à Alger.

Naâmane Meziche après avoir été détenu au secret pendant 47 jours(*), avait été présenté devant le juge d'instruction le 19 février 2006 puis placé sous mandat de dépôt à la prison de Serkadji sous le chef d'inculpation d'« appartenance à un réseau de terroristes activant à l'étranger ». Libéré quelques semaines plus tard en vertu de la politique de «réconciliation nationale », il était retourné à Hambourg. Il avait renoué des contacts en Syrie en 2003 assurant la liaison avec certains dirigeants d'Al Qaeda. Il se trouverait actuellement dans une zone tribale du nord Waziristan. Il fréquentait, comme eux, la mosquée Al Qods, et était très proche de Mohamed Atta et de Ziad Jarrah, né le 11 mai 1975 à Mazraa au Liban, (dont la soeur était installée en région parisienne), et qui étaient respectivement aux commandes du vol qui a percuté le WTC et
du vol 93 d'United Airlines qui s'est écrasé en Pennsylvanie.

Religieux extrémiste, Mohamed Fizazi son beau-père, de nationalité marocaine, a prêché à plusieurs reprises à la mosquée al-Qods de Hambourg, quand elle était fréquentée par les terroristes du 11/9.
Il a été arrêté au Maroc en 2003 pour son rôle présumé dans les attentats de Casablanca et condamné à 30 ans de réclusion.

Naâmane Meziche apparaît comme l'élément pivot de la partie européenne de la menace; il était lié également à Karim Mehdi et à Ramzi Binalshib, pressenti pour être le dernier kamikaze du 11septembre, mais qui était resté en Europe. Karim Mehdi avait été arrêté à Roissy en mars 2003 en compagnie de Christian Ganczarski (un autre français) soupçonnés d'avoir planifié une attaque à la voiture piégée à la Réunion, du type de celle du night-club de Bali, et d'avoir eu un rôle logistique dans l'attaque de Djerba.

L'arrestation du dénommé Rayad Hanouni le 2 octobre à la gare de Naples a mis en évidence des connexions avec un réseau évoluant dans le sud de la France, en particulier à Marseille et à Avignon. Ce qui vient d'entraîner l'interpellation d'au moins trois personnes à Marseille et Bordeaux en relation directe avec le franco-algérien toujours en audition en Italie.

Au plan opérationnel, ce sont deux frères de nationalité britannique dont l'un déclarait s'appeler Abdul Jabbar, agés d'environ 30 ans, originaires de Jelhum dans le nord du Pakistan, qui seraient les chefs du réseau préparant les attentats de type « Bombay » planifiés pour être déclenchés par des commandos en Europe, avec un soutien logistique des individus cités ci-dessus. L'un des deux anglais a été tué le 8 septembre dans une attaque par un drone « Predator » dans la région de Datta Khel une zone tribale du Nord Waziristan, mais la localisation de son frère reste inconnue pour l'instant.

Un officier de l'I.S.I (les services de renseignement pakistanais) a indiqué que sa traque durait depuis près d'un an, en lien avec celle de huit ressortissants allemands également impliqués dans le complot. Ces individus avaient passé des appels téléphoniques vers Londres et l'Allemagne pour activer l'opération et en débuter le compte à rebours.

Ces djihadistes européens ont été tués dans la série d'attaques dans laquelle Oureshi le chef de l'IJG (Groupe du Djihad Islamique), une branche de l'IMU (mouvement islamique de l'Ouzbekhistan), très présent à la mosquée Al Qods, et instigateur de ce type « d'attaques suicides nombreuses et simultanées » (« swarm attacks »). Il avait également pour spécialité de recevoir des combattants d'origine européenne, essentiellement allemande, envoyés par Meziche, de les entraîner avant de les renvoyer à Berlin. Mais d'autres étrangers se concentrent dans ce secteur, en particulier des Tchétchènes et des Turcs ayant séjourné en Allemagne. (On a pu identifier parmi eux un ancien pilote turc de F-16 !)

L'ensemble de l'opération était coordonnée par Younis al Mauritani et avait reçu l'approbation des chefs d'Al Qaeda.

Ce sont les informations fournies par Ahmed Sidiqui, lui aussi de nationalité allemande, capturé en juillet qui ont amené la CIA à déclencher cette série d'attaques de drones pour tenter de tuer dans l'oeuf cette action terroriste de grande ampleur.

Sidiqui avait quitté Hambourg en février 2009 avec dix autres volontaires pour se rendre dans les zones tribales du Pakistan et a précisé que l'un de ses compagnons de voyage était l'un des fantassins qui devait participer à l'attaque au lance-roquette et au fusil d'assaut planifiée en Allemagne,
certains parmi les autres (dont lui) devant participer à la logistique de l'opération.

Il avait déclaré à sa famille qu'il partait pour refaire sa vie, et l'avait prévenue de son retour en prétextant qu'elle lui manquaient !

Par ailleurs, les services de l'I.S.I avaient découvert après une attaque, un passeport au nom de Saïd Bahajji, correspondant au nom d'un des membres de la cellule de Hambourg qui avait quitté l'Allemagne quelques jours avant les attaques sur le WTC. Ils avaient également découvert un autre passeport, espagnol cette fois, délivré à Raquel Burgos Garcia, nom de l'épouse de Amer Azizi, un marocain suspecté à la fois dans la préparation de l'attaque du 11 septembre et de celles dans les
trains de Madrid en 2004.

C'est par des interceptions de sécurité de communications entre des portables émettant de différentes zones de la frontière pakistano-afghane vers des correspondants de la communauté britannique d'origine pakistanaise de la région des Midlands en Angleterre par le GCHQ (Agence des communications britannique) qu'environ vingt sujets de « Sa Gracieuse Majesté » ont pu être ciblés ab initio par les « Predators » américains, désorganisant ainsi la coordination des attentats.

Il n'empêche que malgré les coups très durs portés à la fois à la logistique et aux opérationnels de ces actions planifiées, un certain nombre de djihadistes d'origine européenne ou bi-nationaux, entraînés et d'autant plus déterminés qu'ils ont à coeur de porter la vengeance de leur « frères » comme devoir sacré, n'ont pas encore été localisés, et que tous les donneurs d'ordres installés dans les « zones grises » du Pakistan n'ont pas encore été éliminés. Les attaques de "Predator" vont continuer, malgré la réserve des Pakistanais, et les attaques taleb en représailles contre les convois logistiques de l'ISAF

Alain Duprat

(*) Pour le fun : une campagne de protestation exigeant la libération de Meziche avait été lancée par Amnesty International et la Ligue des droits de l'Homme à l'époque !!!