SABOTAGES DE LA SNCF
l'extrême gauche en examen

décembre 2008

Suspectées d'avoir saboté les lignes de TGV dans la nuit du 7 au 8 novembre, neuf personnes membres d'un groupe baptisé "Comité invisible" étaient mises en examen pour terrorisme une semaine plus tard. Le 2 décembre, des cinq retenus en détention, trois étaient libérés tout en restant en examen. Seul le chef, Julien Coupat, et sa compagne, Yldune Lévy, étaient maintenus derrière les barreaux. Sans préjuger de leur responsabilité, ces gens appartiennent à l'extrême gauche militante. Sous surveillance de la police depuis des mois, pour cinq d'entre eux, leur présence est attestée à proximité des lieux au moment du délit. Pour la plupart âgés d'une vingtaine d'années, seul leur chef a atteint la trentaine. Nous avons pris connaissance de deux ouvrages rédigés par le " Comité invisible " : " Avant-garde et mission " et, surtout, " L'insurrection qui vient ".

 

Dans " L'insurrection qui vient ", sur 126 pages, les trois quarts s'acharnent à dénoncer le système dans lequel nous vivons, forçant le trait pour en caricaturer les travers afin de le présenter comme une dictature achevée. Le " situationisme " (1) inspire ses auteurs.

Ces derniers rejettent le consumérisme exacerbé de nos concitoyens, nous ne saurions les en blâmer. Mais quand ils suggèrent de s'organiser en communautés, les " communes ", " pour ne plus devoir travailler ", c'est en parasites qu'ils aspirent à vivre.

" Les combines sont multiples, lit-on. Outre le RMI, il y a les allocations, les arrêts maladie, les bourses d'études cumulées, les primes soutirées pour des accouchements fictifs, tous les trafics... Ce qu'il est important de cultiver, de diffuser, c'est cette nécessaire disposition à la fraude... "

De là, le texte invite à détruire la société en évoquant " trois types de sabotage ouvrier : ralentir le travail, du " vas-y mollo " (sic) à la grève du zèle, casser les machines ou en entraver la marche, ébruiter les secrets de l'entreprise ".

Ayant bien compris les faiblesses de nos sociétés dépendantes des approvisionnements divers (eaux, électricité, nourriture etc...) le livre préconise de saboter la machine sociale " de reconquérir et réinventer les moyens d'interrompre ses réseaux ".
Viennent alors des mots qui vont peut-être coûter cher à Coupat et ses amis : " Comment rendre inutilisable une ligne de TGV, un réseau électrique ? ".

Les rédacteurs de l'ouvrage continuent. Il faut " Tout bloquer, voilà désormais le premier réflexe de tout ce qui se dresse contre l'ordre présent. Dans une économie délocalisée, où les entreprises fonctionnent à flux tendu, où la valeur dérive de la connexion au réseau... bloquer la production, c'est aussi bien bloquer la circulation ".

Vient ensuite la citation d'insurrections récentes citées en exemple : " L'incendie de novembre 2005 en offre le modèle. Pas de leader, pas de revendication, pas d'organisation, mais des paroles, des gestes, des complicités " (2). Plus loin : " On se souvient de l'éphémère BAFT (Brigade Anti-Flic des Tarterêts) une façon de préserver cette liberté ".

Les références au passé ne manquent pas non plus : " Si la carte d'identité électronique venait à être mise en place, notre tâche n'en serait que plus difficile. La Commune de Paris avait en partie réglé le problème du fichage : en brûlant l'Hôtel de Ville, les incendiaires détruisaient les registres de l'état civil. Reste à trouver les moyens de détruire à jamais des données informatisées ".

Les dernières pages sont consacrées au passage à l'insurrection généralisée. " La commune, lit-on, est l'unité élémentaire de la réalité partisane. Une montée insurrectionnelle ne peut être rien d'autre qu'une multiplication de communes, leur liaison et leur articulation... " Est évoquée la naissance d'" une bande de frères et de soeurs liés " à la vie à la mort " et la réunion d'une multiplicité de groupes, de comités, de bandes pour organiser l'approvisionnement et l'autodéfense d'un quartier, voire d'une région en soulèvement. "

La police représente une cible de choix : " L'offensive visant à libérer le territoire de son occupation policière est déjà engagée... " On imagine l'écho que peut recevoir de tels propos dans certaines banlieues ! Tactiquement, les méthodes ont du reste déjà fait leurs preuves : " Ayant le choix du terrain, on aura soin, comme le Black Block à Gênes en 2001 (3), de contourner les zones rouges, de fuir l'affrontement direct et, décidant du trajet, de promener les flics au lieu d'être promenés par la police... "

Enfin, démentant les affirmations qui décrivent Coupat et ses amis sous les traits de braves garçons, il est écrit : " Il n'y a pas d'insurrection pacifique. Les armes sont nécessaires... " Certes, suivent ces mots : " Il s'agit de tout faire pour en rendre l'usage superflu. Une insurrection est davantage une prise d'armes, une " permanence armée ", qu'un passage à la lutte armée... Face à l'armée, la victoire est politique ". Il y a là, croyons-nous, quelque naïveté. Quand les armes sont en main, si le pouvoir ou une forte proportion de la population résiste, la guerre civile ne manque pas d'éclater.

L'autre livre porte le titre de " Avant-Garde & Mission... la Tiqqounnerie ". Cela fait un peu potache. Et pourtant !

On lit : " Le projet Tiqqun repose essentiellement sur trois sources, chacune d'elles composant dans ce texte une partie : la pensée de Heidegger... la réflexion cabalistique juive, le mouvement philosophique et politique nihiliste ".

Que vient faire la " réflexion cabalistique juive " dans l'affaire ? Coupat a collaboré avec une publication nommée " Tiqqun ", organe à un moment du " Comité invisible ". Le " tiqqun ", concept imaginé par le kabbaliste Isaac Louria (4), signifie réparation. Il suit le " chevirah " ou brisure des vases et symbole de destruction. En d'autres termes le " tiqqun " s'apparente à la reconstruction après la destruction purificatrice. En clair, Coupat et ses amis font de l'ultra-gauchisme à la sauce ésotérique !

Notes
(1) " L'internationale situationiste " est née en 1957. Guy Debord en fut l'un des principaux animateurs. L'organisation joua un rôle important pendant les événements de mai 1968. Elle disparut au début des années 70.
(2) Il s'agit des émeutes qui ont démarré à Clichy-sous-Bois, dans la banlieue parisienne, et qui ont duré trois semaines, provoquant la destruction de 9000 véhicules.
(3) Lors du 27ème sommet du G8, en 2001, des mouvements autonomes nommés Black Block ont détruit de nombreux magasins.
(4) Le rabbin Isaac Louria (1534-1572) avait créé une école kabbaliste. Son enseignement fut transmis par ses élèves après sa mort.

 LES RÉSEAUX DE L'ULTRA-GAUCHE

Comme nous le savons, Eva Joly se présente sur la liste des Verts, aux côtés de Daniel Cohn-Bendit, aux prochaines élections européennes. Avec la mise en examen de Julien Coupat et de ses amis, mais aussi la médiatisation d'Olivier Besancenot et l'arrestation du chef présumé de l'ETA, Garikoïtz Asiazu Robina, dans les Hautes-Pyrénées, l'extrême-gauche fait beaucoup parler d'elle ces temps-ci.

Nous distinguons, en France, trois catégories d'extrémistes de gauche :
- les notables,
- les agitateurs politiques,
- et les activistes violents.

Les premiers, sont présents parmi les techniciens supérieurs et dans les professions libérales. On en trouve même dans la haute administration et dans les cabinets ministériels, sous le masque des socialistes, quand les élections sont favorables à leur parti. Tout le monde se souvient de la carrière de Lionel Jospin. Il convient aussi d'évoquer la place occupée par les notables de l'extrême-gauche au sein du Syndicat de la magistrature. Créé le 8 juin 1968, regroupant près de 10% des magistrats, son activisme pèse lourd sur les décisions de la Justice.

Les notables sont l'assurance vie de l'extrême-gauche. Connaissant les arcanes de notre société, ayant acquis une certaine respectabilité, ils protègent les agitateurs politiques et, aussi souvent qu'ils le peuvent, les activistes violents. Eva Joly appartient à cette caste d'intouchables.

Néanmoins, par son engagement politique, elle s'est rapprochée de la seconde catégorie, les agitateurs politiques, dont Cohn-Bendit fut un modèle représentatif, aujourd'hui incarné par José Bové. Ces gens ont constitué un vaste réseau associatif, tournant autour d'ATTAC (2), des syndicats Sud, d'officines à prétentions écologistes ou de partis politiques comme Lutte ouvrière ou la LCR (Ligue communiste révolutionnaire), avec Olivier Besancenot.

Pour attirer à elle des partisans, l'extrême-gauche défend des causes parfois dignes d'intérêt, comme le refus des OGM, ou néfastes pour le pays, comme le soutien aux sans-papiers. Tactiquement, plutôt que la violence à l'état pur, elle préfère la provocation, mais restant toujours à la limite de la légalité, pour donner à ses activistes l'air de Robin des Bois modernes. De cette façon, elle banalise ses idées sous des apparences bonhommes.

Après les expériences menées par Action Directe ou les Brigades Rouges, l'extrême-gauche a compris l'improductivité du sang versé, qui fait peur à son réservoir de sympathisants. La violence gratuite ne remplit pas son rôle attendu d'allumeur de la révolution mais fait au contraire fonction d'éteignoir de " la Cause ".

L'extrême-gauche n'en continue pas moins de cultiver l'idée du " Grand Soir ", bouleversement social envisagé dans la destruction. Dans la perspective de cet événement, véritable avant-garde, elle suscite des groupes comme le " Comité invisible " de Coupat ou le Black Block. Elle entretient aussi le contact avec des organisations terroristes régionalistes, comme l'ETA basque, ou étrangères, comme les MEK de Maryam Rajavi (2).

Aussi, à ceux qui voient dans l'extrême-gauche des groupuscules sans avenir, nous disons prenez garde ! Elle est plus dangereuse que jamais.

Notes
(1) " Association pour la taxation des transactions pour l'aide aux citoyens ". Cette dénomination n'a plus guère de sens compte tenu des activittés fédératives d'ATTAC.
(2) Voir le livre "
Brûlé vif " écrit par Alain Chevalérias.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

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