L’EUROPE DES SOIXANTE-HUITARDS

Daniel Cohn-Bendit contre la liberté d’expression

février 2009

A Bruxelles, Vaclav Klaus accuse l'Union européenne de dérive antidémocratique (Associated Press-19.02.09). Eurosceptique convaincu, le président tchèque Vaclav Klaus, dont le pays assure la présidence tournante de l'Union européenne, a lancé le 19 février à Bruxelles, devant le Parlement européen, une charge virulente contre une Union européenne devenue, selon lui, antidémocratique et élitiste.

Deux mois plus tôt, on lisait dans le titre d’un article du Monde du 6 décembre 2008: « Quand le Président tchèque s’en prend à DanielCohn-Bendit ». A ces mots, on nourrissait le sentiment d’une attaque verbale lancée par Vaclav Klaus, Président de la Tchéquie, contre le Saint Innocent député Vert interchangeable français et allemand. Le texte, il est vrai, à condition d'en prendre connaissance avec attention, démentait cette approche, même si son auteur cherchait à induire le lecteur en erreur en jouant sur les mots. Que s’est-il donc passé à Prague le 5 décembre ?

Il faut d’abord savoir : le Président Vaclav Klaus est en faveur de la construction européenne. Il l’a prouvé en 1996, en négociant et en signant le traité d’adhésion de la Tchéquie à l’Union européenne. Il s’avère néanmoins un adversaire du Traité de Lisbonne et de l’Europe fédéraliste. Cette position énerve d’autant plus les partisans de cette dernière que, le 1er janvier, il doit occuper la présidence tournante de l’Europe, représentant son pays et prenant la suite de Nicolas Sarkozy.

Les 4 et 5 décembre, à ce titre, il recevait les chefs des groupes politiques du Parlement européen à Prague. Après un dîner offert le 4 par le Premier ministre Mirek Topolanek, le lendemain, ils rencontraient Vaclav Klaus, au Château de Prague, la résidence officielle de celui-ci.

Cohn-Bendit représentait le groupe Vert. D’ouverture, prenant la parole, il adopta un ton ironique, assez peu de mise à l ‘égard d’un chef d’État, et quels que soient les sentiments que l’on nourrit à son endroit, dans une enceinte officielle. Puis il attaqua.

« Sur le Traité de Lisbonne, commença-t-il, je me moque de votre avis sur ce sujet. Je veux savoir ce que vous allez faire si la Chambre tchèque des Députés et le Sénat l’approuvent. Allez-vous respecter la volonté des représentants du peuple ? » Une manière de mettre en doute la légitimité d’un homme, élu à la tête de son pays par un Parlement, avec lequel on peut, en outre, lui supposer une certaine communauté de pensée.

Sur un autre plan, la question ne manquait pas de piquant, quand on se souvient avec quel aplomb Nicolas Sarkozy a méprisé l’opinion d’un autre peuple, celle des Français s’exprimant par référendum, en faisant adopter le Traité de Lisbonne en Congrès par les deux chambres réunies.

Puis Cohn-Bendit continua : « Je veux que vous m’expliquiez quel est votre degré d’amitié avec M. Ganley, d’Irlande. Comment pouvez-vous rencontrer une personne dont les finances ne sont pas claires ? »

Par ces mots, Cohn-Bendit faisait allusion à des accusations portées par les Verts contre Libertas. Organisation créée par Declan Ganley, Libertas a milité avec succès pour le non au Traité de Lisbonne, lors du référendum du 12 juin 2008 en Irlande. Relayée par les Verts et certains européocentristes comme Jean-Pierre Jouyet, ancien Secrétaire d’État français aux Affaires européennes, une campagne de presse prétend la structure de Ganley financée par les Américains, nommément le Pentagone et la CIA.

D’une part, l’affaire nous semble peu crédible, l’establishment américain ayant toujours soutenu la formation d’une Europe fédéraliste. D’autre part, si l’on veut travailler à découvrir les financements de la CIA sur le Vieux Continent, les structures mondialistes et certains élus des partis politiques de pouvoir, y compris en France, seraient mieux qualifiés pour subir de telles inquisitions.

On comprend Vaclav Klaus s’échauffant et répondant à Cohn-Bendit : « Vous n’êtes pas sur les barricades à Paris ici... »

Un renfort accourait alors à la rescousse du député Vert, en la personne de Brian Crowley, membre irlandais du Parlement européen. « J’ose dire, assura-t-il sans mesurer l’étrangeté de ses propos, que les Irlandais souhaitent le Traité de Lisbonne (...) Puis d’ajouter. Cela a été une insulte que vous rencontriez Declan Ganley, un homme sans mandat électif ».

Vaclav Klaus, réagit avec ses souvenirs de citoyen d’un pays victime de l’ère communiste : « Je ne pensais pas que quelque chose comme cela était possible et je n’ai jamais expérimenté rien de tel au cours des 19 dernières années. Je pensais que c’était une méthode du passé, que nous vivions en démocratie, mais c’est la post-démocratie, vraiment, qui gouverne l’Union européenne ». Il aura dit en quelques mots ce que la majorité des Français ressent dans ses tréfonds.

Il lui fallait aussi défendre l’honneur des électeurs Irlandais en notant : « Si M. Crowley parle d’une insulte au peuple irlandais, alors je dois dire que la plus grande des insultes pour le peuple irlandais est de ne pas accepter le résultat du référendum ».

Cet échange verbal prouve deux choses : le mépris des euro-fédéralistes à l’égard des peuples et leur haine pour ceux qui osent s’opposer à leurs desseins. Cela prouve aussi que Vaclav Klaus a raison quand il dénonce la dérive antidémocratique des institutions européennes.

 

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
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