HISTOIRE
Le Qatar

On sait le Qatar ayant créé la chaîne de télévision Al-Jazeera. On le sait aussi avoir été très actif dans son soutien diplomatique et militaire au CNT libyen en guerre contre Kadhafi. Enfin personne n’ignore qu’il tire sa puissance économique du pétrole et d’une fabuleuse réserve de gaz naturel. On connaît moins son histoire.

Pendant l’antiquité, la péninsule de l’actuel Qatar fait partie de l’univers de la « Mer inférieure », désignant le futur Golfe arabo-persique par opposition à la Méditerranée, baptisée « Mer supérieure ». Le futur émirat est alors ce qu’il restera pendant des siècles : une bordure maritime, parsemée de villages de pêcheurs, soumis aux razzias des tribus nomades du désert qui s’imposent sur eux en suzerains. L’islamisation de la région, au VIIème siècle, ne changera rien à ces pratiques.

Au début du XVème siècle, cependant, les Portugais s’emparent du détroit d’Ormuz puis du Qatar en 1517. Ils sont chassés de ce dernier en 1538 par les Ottomans.Occupations superficielles en réalité, ne gênant en rien les conflits entre les tribus de l’intérieur des terres.

En 1783, les Perses sont expulsés à leur tour de l’île de Bahreïn, qu’ils occupaient, par Ahmed Al-Khalifa. Celui-ci parvient à prendre le contrôle du Qatar, où les tribus prêtent allégeance à ses successeurs, mais sans remettre en cause la souveraineté ottomane.

Cependant, dans l’ensemble de la péninsule arabique, un nouveau pouvoir surgit : en 1744, Ibn Abd Al-Wahhab, fondateur du wahhabisme, secte intégriste musulmane, s’allie au clan des Saoud, qui part à la conquête de toute la péninsule. En 1851, plusieurs villages du Qatar, dont celui de Doha, la future capitale, reconnaissent l’autorité des Saoud, influence qui perdure encore au sein de la population sous une forme religieuse.

À la même époque, les Al-Thani, une famille de notables locaux, pour renforcer leur influence cherchent des appuis extérieurs et se soumettent à l’autorité des Ottomans. Ces derniers, afin de soutenir leurs alliés, ouvrent un petit poste militaire à Doha.

Dans cet imbroglio, surgissent les Britanniques. Afin de s’y assurer le libre passage, ils imposent un accord de paix dans les eaux du Golfe et reconnaissent l’autorité de Bahreïn sur le Qatar.

Comme il fallait s’y attendre, des contestations éclatent, jusqu’à prendre l’allure d’une révolte des Qataris contre les Al-Khalifa de Bahreïn. En 1867, ces derniers envoient une expédition navale pour soumettre les insurgés. Le colonel britannique Lewis Pelly entame des pourparlers avec les Al-Thani et signe avec eux une reconnaissance de l’indépendance du Qatar. Bahreïn est mis hors jeu et les Al-Thani resteront famille régnante jusqu’à aujourd’hui.

En 1916, succédant définitivement aux Ottomans, dont le poste de Doha a été évacué en 1915, les Britanniques signent un traité formel de protectorat avec le Qatar, tandis que les Saoudiens renoncent à toute prétention sur le territoire. En 1970, cependant, dans le mouvement des décolonisations, la Grande-Bretagne finit par se retirer. Le Qatar entre quelques mois dans la fédération en formation des Émirats Arabes Unis. Mais, en 1971, il se déclare État souverain et devient membre des Nations Unies.

Néanmoins, à l’intérieur de la famille des Al-Thani, les crises de pouvoir se succèdent. En février 1972, sans violence, l’émir est destitué par son cousin qui, à son tour, en juin 1995, sera chassé de l’émirat par son fils aîné, Cheikh Hamad Ibn Khalifa Al-Thani, menacé à son tour par une tentative de coup d’État en février 1996.

Cheikh Hamad a des ambitions modernisatrices pour son pays. En 1999, les premières élections communales se déroulent. Puis en avril 2003, il accorde une Constitution, suivie des premières élections parlementaires au suffrage universel en 2004.

S’inscrivant dans la tradition de la quête d’un grand protecteur initiée par les Al-Thani, le Qatar se range dans le camp américain. Pendant la guerre d’Irak, en 2003, il héberge l’état-major installé par Washington. En outre, depuis 2002, un accord militaire octroie l’utilisation de la base aérienne d’Al-Eideïd aux forces de l’Oncle Sam.

Cheikh Hamad n’en reste pas moins un potentat arabe. Époux de trois femmes, il a 24 enfants. Ses intentions réelles restent à décrypter au regard de ses engagements récents.

Jean Isnard

Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis le 11 septembre 2001
www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

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