HISTOIRE
Les Roms 

Le 16 septembre 2010, dans la ville de Yambol, dans le sud-est de la Bulgarie, plusieurs familles de Roms étaient expulsées d’un immeuble occupé illégalement. N’ayant nulle part où aller, une centaine d’entre eux ont installé des campements sur les terrains des alentours. Personne en Europe ne s’en est ému. Pourtant ces Roms, de nationalité bulgare, sont dans leur pays. On voit le problème des Roms une problématique qui ne concerne pas que la France.

Il est aujourd’hui établi que les Roms se mirent en mouvement vers le VIIIème siècle, quittant le nord du sous-continent indien, plus précisément le Pendjab et le Sind. Si la relation de Ferdowsi (1) sur cette migration est en partie romancée, elle se voit néanmoins confirmée par l’étude des idiomes maternelles des Roms, que l’on a découverts proches du sanskrit, langue principale de l’Inde depuis au moins quatre millénaires. Des études génétiques récentes ont du reste confirmé l’origine indienne de cette population (2).

Si l’on ne connaît pas avec précision la cause exacte de leur départ de l’Inde, on en a cependant une petite idée : il semble qu’il soient issus des groupes hors castes réduits à des métiers nécessaires mais considérés impurs comme équarisseurs, tanneurs, fossoyeurs, éboueurs etc... En outre, la loi traditionnelle leur interdisait de se sédentariser, les obligeant à une errance perpétuelle. Expulsés, peut-être simplement s’échappant, ils se dirigèrent vers le nord.

En Afghanistan et en Iran, ils servent d’abord d’éclaireurs aux envahisseurs mongols en échange d’une partie du butin de guerre. Au XIVème siècle, ils se mettent aux ordres de Tamerlan, conquérant turco-mongol, et arrivent aux portes de l’Europe à sa suite.

A partir du XVème siècle, on les voit apparaître en Hongrie, en Allemagne, jusqu’à la Baltique et en Suisse. Ils sont mentionnés pour la première fois en France au cours de l’été 1419 à Châtillon-sur-Chalaronne (Bresse), à Sisteron et à Mâcon. En 1423, Sigismond 1er, empereur germanique, accorde à un chef de bande rom le droit de passer de Transylvanie (actuelle Roumanie) en Hongrie.

A leur arrivée en Europe, les Roms furent semblent-ils bien reçus. A une époque qui en manquait, ils apportaient des distractions, se produisant dans les villages et les foires, chantant, dansant ou jouant de la musique. Ce fait nous semble important : il n’existait pas d’a priori contre eux.
Pourtant, à partir de la fin du XVème siècle, les textes commencent à parler d’un rejet des populations autochtones. Les villes leur ferment les portes, lassées de leur mendicité. Dans les campagnes, ont les accuse en outre de marauder, de voler des poules et des chevaux. On leur attribue même des disparitions d’enfants.

On peut, bien sûr, voir là de pures calomnies dictées par une habitude de rejet de l’étranger. Mais on se demande, si l’on retient l’hypothèse, pourquoi ils furent d’abord bien accueillis. Il semble plus logique que les comportements, qu’on leur reproche encore aujourd’hui, même s’ils ne sont pas le fait de tous les Roms, soient la cause de la mise à l’écart dont ils allaient souffrir.

Historiquement, ils vont s’attacher plus particulièrement à la future Roumanie et à la Bulgarie. Ainsi, dès octobre 1385, par contrat féodal, un de leur groupe, formé de 40 familles, « se donne » au monastère de Tismana. Il s’agit d’une sorte de servage volontaire révocable, si l’intéressé se rachète lui-même. La quasi totalité des Roms va opter pour ce statut, nommé « robie », devenant ainsi le bien des moines et des seigneurs féodaux dont ils se font les serviteurs zélés (3).

Mais, dans le reste de l’Europe, les tensions montent avec les Roms. En 1666, Louis XIV ordonne l’envoi aux galères des « Bohémiens » de sexe mâle. Au XVIIIème siècle, l’Encyclopédie les qualifie de « vagabonds déguisés, qui (...) abusent le peuple sous prétexte de dire la bonne aventure ».

À partir de la fin du XVIIIème siècle, néanmoins, on commence à chercher une solution humaine pour régler le problème que représentent les Roms. En Espagne, on tente de les intégrer à la population. En Hongrie, on leur donne des terres et des bêtes. Mais ils les vendent à leurs voisins et reprennent leur vie nomade. Quant à la Roumanie, au XIXème siècle, la « robie » y est abolie. Cependant, leur retirant leur fonction sociale, cette réforme dépossède les Roms sédentarisés de leur statut et les oblige à reprendre la route.

En ce début de XXIème siècle, nous n’avons pas fait beaucoup de progrès et le problème reste entier.

Jean Isnard

Notes

(1) Poète et écrivain iranien du Xème siècle.
(2) En particulier des études australiennes publiées en 2004 et réalisées à l’ « UWA Centre for medical research, University of Western Australia », à Perth.
(3) D’après le livre de Georges Castellan « Histoire du peuple roumain », éditions Armeline
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Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis le 11 septembre 2001
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