HISTOIRE
DE LA ZONE TRIBALE
AU PAKISTAN

À propos du Pakistan, on entend souvent parler d’une « zone tribale, » région du pays où les Taliban et les hommes d’Al Qaïda circuleraient librement venant de l’Afghanistan voisin. Administrativement coupée du reste du pays, la zone tribale, le FATA, est interdite aux étrangers.

Quand les Soviétiques occupaient l’Afghanistan, dans les années 80, échappant au contrôle d’Islamabad, elle était le sas d’entrée pour les médecins et les journalistes occidentaux qui accompagnaient la résistance. Sa naissance remonte à l’empire britannique des Indes.


Les Britanniques commencent à s’installer en Inde dès le début du XVIIème siècle. 150 ans plus tard, ils contrôlent l’ensemble du sous-continent dont ils ont chassé les Français. A partir du XIXème siècle, au nord, de l’autre côté de l’Hindou Kouch, la barrière montagneuse de l’Afghanistan, Moscou prend pied au Turkménistan, en Ouzbékistan puis à Samarkand et à Boukhara.

Dans la steppe asiatique, les Russes massent leurs forces et complotent pour passer l’Hindou Kouch, puis déferler sur l’Inde. Au sud, les Britanniques travaillent à contrecarrer ce projet afin de rester les maîtres du sous-continent. Pour arriver à leurs fins, Londres et Moscou aspirent tous deux à s’emparer de l’Afghanistan. C’est le «Grand jeu,» décrit avec brio par Rudyard Kipling (1865-1936).

A trois reprises, les Britanniques vont tenter de s’imposer par les armes. La première fois en 1839, se termine par un désastre. Kaboul s’étant soulevé, les forces d’occupation, se replient sur l’Inde. Les 16000 hommes du corps expéditionnaire sont massacrés. Les Afghans ne laissent qu’un survivant, le chirurgien Brydon, chargé par les Afghans d’annoncer la mort de ses camarades.

Le 14 juin 1878, éclate la deuxième guerre anglo-afghane. Elle se solde par la victoire des Britanniques mais, plutôt qu’une occupation directe, ceux-ci installent au pouvoir un homme retors, l’émir Abd ur-Rahman. En échange de l’or qu’ils lui versent pour prix de sa neutralité, le 12 novembre 1893, ils l’obligent à céder une partie de son territoire.

La limite entre l’Inde et l’Afghanistan s’appellera désormais ligne Durand, du nom du signataire britannique du Traité, Sir Henry Mortimer Durand.

Frontière néanmoins théorique, la ligne Durand coupe les tribus pachtounes en deux. Mais Londres connaît l’irrédentisme de cette ethnie. En outre, plus que l’acquisition de nouveaux espaces, la couronne cherche à se ménager une zone neutre et crée la zone tribale.

Dans les faits, celle-ci est divisée en sept agences auto-administrées qui échappent au droit britannique. La Justice y est rendue par les instances tribales et la police, comme l’armée, ne peuvent pas y exercer leur autorité. Résultat, la zone tribale abrite tous les trafics : on y fabrique des armes, accorde l’asile aux délinquants et, un jour, installera même des laboratoires pour raffiner l’opium.

En échange, les tribus s’engagent à protéger l’Inde des incursions étrangères. A cet effet, des unités militaires sont recrutées sur place. L’une d’elle, le «Khyber Rifles, » levée en 1878 sous le nom de «Khyber Jezailchis, » compte aujourd’hui 3600 hommes et protège les 2500 km de frontière.

En 1947, avec l’indépendance, la partition de l’Inde et la naissance du Pakistan, c’est à ce dernier qu’échoie la frontière avec l’Afghanistan et l’héritage empoisonné de la zone tribale. Pendant plusieurs années, l’autorité pakistanaise s’en tiendra au statu quo.

Jusqu’à l’automne 2001. Quand les forces alliées attaquent les positions d’Al-Qaïda à Tora Bora, les hommes de Ben Laden cherchent refuge dans la zone tribale.

Islamabad réplique en dépêchant des troupes. Aujourd’hui 80 000 hommes. Le consensus est rompu. Les tribus se radicalisent et plusieurs agences se sont ralliées aux Taliban. Aujourd’hui, une partie de la zone tribale est en état d’insurrection.

 

Alain Chevalérias

 
 
 
 
 
 
 
 
Guerrier pachtoun de la zone tribale.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Carte de la zone tribale au Pakistan,
le FATA
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
Photo d'un véhicule de l'armée pakistanaise détruit lors d'affrontements au Waziristan.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

Lire aussi:

 

Retour Menu
Retour Page d'Accueil