MARTYRE DES RAMEAUX
EN ÉGYPTE

mai 2017

Le 9 avril, jour des Rameaux, deux attentats-suicides éclataient en Égypte ciblant des églises coptes. Le premier, à Tanta, ville située au nord du Caire, tuait 27 personnes et en blessait 78 autres. Le second, à l’église Mar Morcos d’Alexandrie, faisait 17 morts, dont 4 policiers, et 48 blessés. Le pape copte Tawadros II venait de quitter les lieux échappant ainsi de peu à l’attaque.

En début d’après-midi, Daech, connu aussi sous le nom d’État islamique, revendiquait les deux massacres. Ils se déroulaient 19 jours avant la visite du Pape François en Égypte. Quatre mois aussi après un autre attentat contre l’église Saint-Pierre et Saint-Paul du Caire qui a tué 29 personnes.

Cette montée de violence de Daech, contre les chrétiens d’Égypte, s’inscrit dans une vaste offensive partie du désert du Sinaï, situé entre la frontière israélienne et la Mer Rouge. Le 19 janvier, l’organisation terroriste diffusait une vidéo via Internet intitulée « La lutte contre les mécréants ». Elle appelait au meurtre des chrétiens coptes aussi bien leur pape que leurs prêtres et leurs hommes d’affaires.

Résultat, le 25 février dernier, 300 réfugiés arrivaient à Ismaïlyia, ville sise sur le canal de Suez. Ils représentaient la quasi totalité de la communauté chrétienne d’El Arish et fuyaient en masse leurs maisons à la suite des atrocités perpétrées contre les membres de leur communauté.

Les témoins racontaient. Trois jours plus tôt, Saad Hana, âgé de 65 ans, avait été abattu de plusieurs balles. Son fils de 45 ans, pour sa part enlevé, avait été brûlé vif. La nuit suivante, un autre chrétien était décapité sous les yeux de sa femme et de sa fille. En l’espace de deux semaines on comptait au moins 7 chrétiens exécutés par Daech. « Les assassins avaient une liste d’une quarantaine de noms », affirmait l’un des réfugiés.

D’où vient cette fureur meurtrière contre une population qui, en dépit d’avanies, est parvenue à survivre à quatorze siècles d’islamisation de l’Égypte ? Si la pratique musulmane n’est pas toujours tendre à l’égard des chrétiens, il faut admettre le Coran plutôt moins dur à leur endroit qu’à celui des autres pratiquants. En tous les cas, dans ce texte, il n’est à aucun moment préconisé de les exterminer. Daech outrepasse le Coran et la charia. Aussi l’organisation terroriste en vient-elle à susciter le rejet du plus grand nombre des musulmans.

Sur ce terrain, il faut admettre le raïs égyptien ayant décrété l’état d’urgence à la suite des deux récentes attaques contre les églises coptes. Le 16 août 2016, aussi, Abdel Fatah Al-Sissi a fait alléger la loi régissant les autorisations de construction et de réparation des églises. Néanmoins, la législation reste discriminatrice et, quand les mosquées jouissent d’une liberté de prolifération, l’accroissement et l’entretien des lieux de culte chrétiens sont toujours sévèrement encadrés.

En outre, chez une partie de la population égyptienne endoctrinée par les Frères musulmans et les salafistes, s’est ancré un sentiment anti-chrétien très fort. On se souvient de la nuit du Nouvel an de 2011. Un attentat perpétré contre l’église Al Kidissine d’Alexandrie avait déjà causé la mort de 21 personnes. Or, Daech n’existait pas alors.

Le pire reste sans doute la marginalisation des coptes au quotidien. Quand ils représentent 10% de la population et comptent nombre de gens éduqués, l’accès aux charges politiques ne leur est que très rarement accordé. Ils doivent se replier sur les affaires et le commerce.

Alors, si les deux derniers attentats ont le mérite d’attirer l’attention sur eux, ce sera un bien. Parce que les chrétiens d’Égypte, parmi les minorités en souffrance, font partie des oubliés.

 

 

L’Égypte assise
sur le fil de l’épée

Au lendemain des deux attentats contre les églises d’Alexandrie et de Tanta, le Président égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi, a décrété l’état d’urgence pour une durée de trois mois.

Néanmoins, cette décision ne rassure personne. En effet, en 2011, le Printemps arabe a éclaté en Égypte, entre autres, pour dénoncer l’état d’urgence instauré. Le risque est pourtant bien réel. Ainsi, au cours des investigations, les autorités égyptiennes ont découvert Mahmoud Hassan Moubarak, le kamikaze d’Alexandrie, être originaire de la province de Kena, non loin de Louxor. Une vaste opération de ratissage a été menée dans les montagnes qui dominent le Nil à cet endroit, menant à découvrir un camp d’entraînement de terroristes de Daech. Jusqu’ici, les services égyptiens étaient persuadés de la présence des hommes de Daech dans le seul désert du Sinaï. En clair, toute l’Égypte devient un territoire opérationnel pour les terroristes.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

 
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