UN TROISIÈME MANDAT POUR BOUTEFLIKA

novembre 2008

Au cours d'un iftar * célébrant la rupture du jeûne de Ramadan, le 23 septembre, dans la banlieue d'Alger, Abdelaziz Belkhadem, le secrétaire général du FLN, annonçait une révision de la Constitution algérienne.

Abdelaziz Bouteflika, président de l'AlgérieLa déclaration n'a surpris personne. Dans moins de six mois, Abdelaziz Bouteflika, le Président en exercice, arrive à la fin de son second mandat. Or, aux termes de l'article 74 de la Constitution de 1996, le Président sortant ne peut pas se présenter une troisième fois. Mais ne s'agit-il que du destin d'un homme malade et vieillissant ou de l'incapacité d'un régime au fonctionnement opaque à se renouveler ?

En matière de réalité politique, tout en Algérie n'est que faux semblants. La Constitution en vigueur ne proclame-t-elle pas que " le 1er novembre 1954 aura été un des sommets de son destin... " ? Comment peut-on élever l'assassinat de huit civils désarmés, deux musulmans et six Européens, au rang de symbole de l'indépendance ?

Il est vrai, tous les peuples se donnent des mythes fondateurs mais, quand plus loin, on lit : " La fierté du peuple, ses sacrifices, son sens des responsabilités, son attachement ancestral à la liberté et à la justice sociale sont les meilleurs garants du respect des principes de cette Constitution ", on pourrait se demander s'il ne s'agit pas de la loi fondamentale de la Confédération helvétique.

Derrière ces mots creux, se cache une autre vérité. En Algérie deux pouvoirs se côtoient : le civil et le militaire. Sous Boumediene, les deux se confondaient, l'armée et le FLN obéissant au même homme. La machine est tombée en panne en octobre 1988, quand des émeutes sanglantes éclatant à Alger, les islamistes récupéraient le mouvement des mécontents.

Sous la contrainte de la rue, une nouvelle Constitution était promulguée le 23 février 1989. Mais, profitant de l'ouverture démocratique, aux élections, les islamistes emportaient de nombreuses positions. En réponse, le 26 décembre 1991, les autorités annulaient le scrutin des législatives et, profitant des troubles, le 9 février 1992, elles décrétaient l'état d'urgence, reprenant en main le destin du pays.

Depuis cette époque, l'Algérie vit dans une apparence de démocratie. L'armée tente de ne pas trop se montrer, laissant les hommes politiques s'agiter sur la scène. Pour ajouter à l'ambiguïté de la situation, une nouvelle formation, le RND (Rassemblement national démocratique) était créée en 1997. Fausse opposition, elle soutient le Président. Elle fait partie de l'alliance au pouvoir avec le FLN et le Mouvement de la Société pour la paix, organisation islamiste autrefois connue sous le nom de Hamas.

Aujourd'hui, en Algérie, trois tendances dominent : celle des " Barbéfélènes ", comme dit la rue pour désigner l'association de l'armée, des services de renseignement, du FLN et aujourd'hui du RND ; les islamistes, dont une partie est alliée au pouvoir et l'autre passée à la rébellion armée ; et, marginalisés, les modernistes, dont les mouvements kabyles, favorables à une libéralisation du pays et à une décrispation des relations avec la France.

Dans ce contexte, et en dépit des différends entre les personnes et les clans, les gens du pouvoir ont intérêt à s'entendre autour de Bouteflika. Car, le remplaçant, c'est le fragile équilibre de l'appareil qui pourrait se voir remis en cause. Les modernistes auraient alors la chance de se renforcer et d'occuper le vide. Espérons, pour les Algériens, de voir ce jour arriver.

 

Note

* Chez les musulmans, repas festif de rupture du jeûne les soirs du mois de Ramadan.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

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