Ehsan Naraghi:

LES 7 ERREURS DE BUSH EN IRAK

septembre 2004

 

SELON Ehsan NARAGHI,  

«LES 7 ERREURS DE BUSH EN IRAK»

Hors du bunker de ses certitudes, la position de George Bush est devenue intenable. Il s’est d’abord isolé des gens de raison puis, courant trois lièvres à la fois, le terrorisme, le pétrole et un rêve mystique de civilisation du monde, il a dispersé ses troupes et renforcé la terreur. Acculé dans une impasse, il frappe tous azimuts sans porter un seul coup à son adversaire.

 1/ Il s’est isolé pendant plus d’un an des autres pays en méprisant l’autorité des Nations unies. Parti en guerre sur l’affabulation des armes de destruction massives irakiennes, il n’a pas écouté les conseils de la « vieille Europe. » Croyant avoir raison contre tous, il s’est retrouvé seul à avoir tort. Qu’enfin, comme le suggéraient L’Allemagne, la France et la Russie, il accepte aujourd’hui une conférence sur l’Irak rassure médiocrement. Car, là-bas, sur les berges du Tigre et de l’Euphrate, où les chiites avaient salué le renversement de Saddam, à coups d’ignorance et d’incompréhension des mœurs locales, il a retourné contre lui une communauté pourtant favorable à son intervention.

2/ Il use de faux prétextes. Celui des armes de destruction massives étant tombé, il invoque le droit, pour justifier son agression, quand son seul argument est la force. Il parle d’une menace militaire de l’Irak contre l’Amérique, quand autrefois, surarmé, ce pays se révéla incapable de gagner la guerre contre l’Iran. Il prétend avoir attaqué pour faire rendre gorge à un dictateur quand, de la Libye au Turkménistan, il traite avec les pires autoritarismes en échange de leur pétrole et laisse indemne la Corée du Nord pourtant puissance nucléaire.

3/ Il disperse ses forces et les met ainsi en péril, attaquant en Afghanistan et en Irak, installant des bases militaires de l’Algérie à l’Asie Centrale en passant par le Qatar, menaçant la Syrie, le Soudan et l’Arabie Saoudite. Même ses ambassades deviennent des camps retranchés. Bientôt ses diplomates devront troquer la tenue de soirée contre le gilet pare-balles.

4/ Il étend le terrorisme au lieu de le réduire. Avec l’arrivée de ses troupes en Irak, il a libéré les mauvais génies en disloquant l’armée et l’administration du pays. Depuis, la violence a décuplé. Autrefois inexistants, plusieurs fois par jour des attentats tuent des Irakiens. A l’abri des exactions sous Saddam, les étrangers risquent la prise en otages et l’égorgement. La Mésopotamie, sous autorité américaine, est devenue le nouveau et principal foyer du terrorisme international. Donnant en apparence raison aux émules de Ben Laden, comme lui, Bush construit le décor d’une guerre mondiale entre l’Orient et l’Occident. Servant les plans de son ennemi, il pousse de plus en plus de jeunes musulmans, rendus fous de colère et de désespoir, dans les bras des recruteurs de l’islam radical. Pire, au spectacle des abominations commises à Abou Ghraib ou des milliers de victimes civiles des bombardements journaliers des Américains, les masses musulmanes crient leur haine contre la première puissance mondiale. Leurs dirigeants, perçus comme les complices de l’Amérique, sont associés dans la même exécration. Résultat, des prises de pouvoir orchestrées par les islamistes radicaux s’annoncent. Le Pakistan est menacé. L’Egypte et l’Arabie aussi.

5/ Courant trois lièvres à la fois, Bush néglige le seul objectif raisonnable, le terrorisme. Celui-ci ne lui sert plus que d’excuse pour étendre sa puissance, comme au Sahara algérien, là comme ailleurs pour affirmer son contrôle sur le pétrole. Et même sur ce plan là, il échoue. En Irak, à cause des sabotages répétés des installations, l’exportation de l’or noir couvre à peine le coût de l’occupation. La revanche du général Hiver s’annonce terrible. Le prix du baril s’est envolé, doublant déjà sa valeur en moins d’un an.

6/ Devenu aveugle à force d’écouter des prêcheurs intégristes, Bush ne voit pas les causes de la haine contre l’Amérique : sa superbe, ses injustices et, plus que tout, son soutien à Israël, cause première de toutes les colères du monde musulman. Sous la pression de l’Amérique, les musulmans ne comprennent pas tant de sévérité à leur endroit, quand les mêmes crimes, perpétrés par l’Etat hébreu, sont passés sous silence. Quand Sharon et ses amis peuvent mépriser les décisions des Nations unies, violer les frontières, s’armer en nucléaire, tuer femmes et enfants, détruire les habitations et se servir contre les Palestiniens de l’arme de la faim.

7/ Bush n’agit plus, il réagit. Les Etats-Unis ont épuisé leurs réserves de pétrole; il réagit en tentant de s’emparer par la force de ce dont il a peur de manquer. Son pays est la cible de l’attaque du 11 septembre; il répond en dépêchant les éléphants de son armée pour chasser les moustiques du terrorisme. La France lui demande de réfléchir avant d’agir; il prend cela pour une trahison et ordonne à ses sbires d’abreuver ce pays d’insultes pour le punir. Enfin, quand l’Irak refuse l’occupation, Bush réplique en bombardant ses villes.

 Dites-le aux Américains, il faut rappeler le soldat Bush car, pour toutes ces raisons, il a perdu sa guerre.

Ehsan Naraghi,
sociologue iranien,
ancien conseiller spécial auprès du Directeur général de l’UNESCO
Auteur de:
  • "Du palais du Chah aux prisons de la Révolution" (Editions Balland)
  • "Islam et laïcité" (Editions des sciences de l'Homme)
  • "L'Orient et la crise de l'Occident" (Editions Entente).
Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 
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