CAISSE D'ÉPARGNE
Ils ne vous ont pas tout dit !

novembre 2008

Le 14 octobre 2008, Charles Milhaud gravissait les marches du perron de l'Élysée, pour rendre compte des pertes de la Caisse Nationale des Caisses d'Épargne dont il était encore le président. 600 millions d'euros, apprenait-on, avaient été perdus par les courtiers du groupe sur des marchés spéculatifs. Le 17 octobre, depuis le Québec, où il était en déplacement, Nicolas Sarkozy exigeait des responsables des pertes qu'ils prennent leurs responsabilités. Le 19, Charles Milhaud annonçait sa démission, suivi par Nicolas Mérindol, son directeur général.

Il faut cependant relativiser l'ampleur de la sanction qu'officiellement ces tristes sires se sont infligés. Au moment de mettre sous presse, Charles Milhaud, apprenons-nous, occupe toujours les fonctions de président du conseil de surveillance de la financière OCEOR, " pôle de banques commerciales du Groupe Caisse d'Épargne à l'international et en outre-mer français ". Figurant parmi les membres du conseil, les noms des plus proches collaborateurs de Milhaud eux non plus n'ont pas disparu : Didier Banquy, Julien Carmona et Thierry Gaubert.

Charles Milhaud apparaît encore à la tête du conseil de surveillance de Natixis, banque de financement et d'investissements de la Caisse d'Épargne. A ses côtés, se tient Nicolas Mérindol. On remarque aussi le nom de Vincent Bolloré, PDG du groupe Bolloré. Ce dernier, on s'en souvient, avait prêté son jet privé et son yacht au Président, tout juste élu, afin qu'il s'accordât quelques jours de repos.

Au Crédit Foncier, autre institution du groupe, Nicolas Mérindol apparaît à la tête du conseil d'administration, de nouveau avec Vincent Bolloré mais cette fois sans Charles Milhaud. Mérindol ne semble pas près de quitter la maison : le 21 octobre, le Crédit Foncier lui renouvelait en effet sa confiance, annonçant sa nomination en tant que président exécutif.

En d'autres termes, pendant que sur la scène on fait mine de couper des têtes, dans les coulisses, on garde les mêmes et on recommence. Mais pourquoi cette mansuétude ?

La presse à grand tirage a oublié de préciser quelques points concernant la fine équipe formée de Milhaud, Didier Banquy, Julien Carmona et Thierry Gaubert.:

Charles Milhaud, élu sur la liste UMP, siège comme conseiller municipal de Marseille.

Didier Banquy a été adjoint au directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy, au ministère du Budget, de 1993 à 1995. Il est aussi élu UMP du conseil régional de l'Essonne.

Julien Carmona a exercé les fonctions de conseiller économique de Jacques Chirac.

Thierry Gaubert s'est fait connaître au service de Nicolas Sarkozy à la mairie de Neuilly puis au Budget. Le 3 avril 2007, il était entendu dans une affaire de détournements de fonds sociaux destinés au logement, en liaison avec son associé en affaires, Philippe Smadja. Il a été mis en examen en février dernier. En outre, Thierry est aussi le frère de Patrick Gaubert, député UMP et président de la LICRA (Ligue contre le racisme et l'antisémitisme).

Mais peut-être le " copinage " politique n'explique-t-il pas tout. Le 17 mars 2005, lors d'un discours prononcé au Palais Bourbon, alors chef de l'UMP, Nicolas Sarkozy avait dit : " Ce n'est quand même pas excessivement audacieux de proposer que les crédits immobiliers soient tout simplement et uniquement garantis sur la valeur des biens achetés ; ni excessivement anormal de demander aux banques d'accorder sur la même hypothèque un nouveau crédit ".

On reconnaît-là le raisonnement qui a conduit aux " subprimes ", quand les organismes de crédit américains prêtaient de l'argent aux accédants à la propriété en prenant en gage leurs maisons. Outre-Atlantique, ajoutée à la pratique de taux de remboursement fluctuants, cette méthode a jeté des centaines de milliers de gens à la rue et enclenché, dès 2007, l'effondrement du système financier mondial.

La Caisse d'Épargne est-elle entrée dans cette logique sous la pression de l'UMP et sous l'influence de Sarkozy ?

Il faut le craindre. En effet, début 2006, s'appuyant sur un rapprochement avec le groupe Banque populaire, la Caisse d'Épargne créait la banque Natixis, qu'elle introduisait sur le marché américain. Quand cette dernière rachetait les fameuses " subprimes " américaines, le poison commençait à infecter le groupe de la Caisse d'Épargne.

En septembre dernier, lors de son voyage à New York, avec emphase, Sarkozy avait demandé des sanctions contre les responsables de la crise financière. Compte tenu de sa proximité de certains décideurs de la Caisse d'Épargne, nous serions en droit d'en savoir plus. Mais, dans la France d'aujourd'hui, entre le droit et les usages, il y a plus qu'une nuance.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
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