LA SYRIE ENTRE GUERRE ET PAIX

mai 2008

Le 24 avril 2008, Haaretz, journal israélien, annonçait le début d'un processus de négociations entre Israël et la Syrie. Deux sources étaient citées.

 

D'une part, le Premier ministre turc, Redjeb Tayyeb Erdogan, dont le pays a servi d'intermédiaire. Selon lui, Israël a dit être d'accord sur le principe d'un retrait du Golan, conquis en 1967 par l'Etat hébreux, en échange de la paix.

Photo Bachar AssadD'autre part, le général Faouzi Choaibi, proche du Président syrien Bachar Al-Assad, qui confirme. Ce dernier appelle en outre Olmert, le Premier ministre israélien, à déclarer que la Syrie ne représente pas un danger nucléaire pour Israël.

A quelques heures d'écart, une annonce non moins étonnante éclatait aux Etats-Unis. Le New York Times et le Washington Post, reprenant les propos d'une source officielle, accusaient la Corée du Nord d'avoir permis à la Syrie de commencer à construire un réacteur nucléaire, capable de produire du plutonium et pouvant servir à des fins militaires. Puis la CIA faisait parvenir aux médias les supposées photos des installations, de l'intérieur des bâtiments, avant leur destruction.

photo du site nucléaire syrien avant la frappe de septembre 2007

Photo du site nucléaire syrien après la frappe de septembre 2007
Photo du site avant et aprés la frappe du 6 septembre 2007

Un véritable roman à rebondissements. En effet, le 6 septembre 2007, un site non identifié avait été attaqué par une force aérienne dans le nord de la Syrie (photo ci-dessus). Cette dernière n'élevait pas de plainte. Quant à Israël, il se gardait de toute déclaration mais laissait entendre qu'il était l'auteur de l'opération. Les Américains affirment qu'un réacteur nucléaire en construction se trouvait là.

Ces affaires soulèvent bien des questions. Nous nous arrêterons à la plus importante à nos yeux : pourquoi les Américains ont-ils dénoncé l'existence d'un projet nucléaire militaire en Syrie, juste après l'annonce d'un accord de paix en cours de négociation entre ce pays et Israël ?

Le Haaretz, encore lui, nous donnait la réponse avant les faits. Dans son édition du 24 février 2007, il révélait que "Les Etats-Unis demandent qu'Israël interrompe tout contact, même exploratoire, avec la Syrie ".

En clair, Washington veut être le maître du jeu et ne voit pas d'un bon oeil Damas et Tel-Aviv s'entendant sans son arbitrage. L'annonce d'un projet nucléaire syrien est faite, semble-t-il, pour déstabiliser l'accord israélo-syrien. Cette fois, nous comprenons la position américaine.

En effet, si Israël et la Syrie concluaient un pacte de non-agression, une alliance de fait, ils jouiraient d'une telle position qu'ils pourraient décider de la configuration de la région moyen-orientale à leur seul profit. En particulier aux dépens du Liban, au risque de susciter une nouvelle crise. Comment ?

Nous savons la Syrie un allié pour le moment inconditionnel de l'Iran et, à ce titre, soutenant le Hezbollah au Liban en même temps qu'il l'instrumentalise à son profit. Concluant un accord avec Israël, Damas serait obligée de rompre ses relations avec Téhéran et, du coup, le Hezbollah deviendrait l'adversaire de la Syrie. Cette dernière et Israël, partageant le même intérêt de se débarrasser du parti chiite, pourraient alors intervenir militairement au Liban pour prendre cette organisation en tenailles. Jusque-là, soyons-en sûrs, l'intervention ne suscitera que des récriminations de pure forme.

Il n'en sera pas de même de la phase suivante. De plusieurs sources sionistes, nous avons entendu parler d'un projet de partage du Liban entre la Syrie et l'Etat hébreu. On sait en effet Israël avide de terres cultivables et d'eau, deux richesses du Sud Liban. En outre, les Israéliens voudront se dédommager de la perte du Golan. Une fois le Hezbollah chassé et la région partiellement débarrassée de sa population, Israël pourrait l'annexer. Le reste du Liban passerait alors sous influence syrienne.

Soyons en sûrs, une telle révision des frontières ne se passerait pas sans heurts, provoquant de nouveaux exodes, des attentats et une insécurité croissante. Les Américains ont des raisons de s'inquiéter.


Alain Chevalérias

Centre de Recherches sur le Terrorisme Depuis le 11 Septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

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