L’armée française
se fait voler ses explosifs

juillet 2015

Le 7 juillet, on apprenait que des explosifs et des munitions avaient été dérobés sur un site de l’armée française, à Miramas dans les Bouches-du-Rhône. Le larcin ne comprenait pas moins de 40 grenades, 170 détonateurs (1) et, surtout, une dizaine de pains de plastic (2) de 250 grammes.

Pendant le déroulement de l’enquête, des indiscrétions signalaient la date du vol pouvant être située non pas dans la nuit précédant sa découverte, mais entre le 3 et le 6 juillet. Cette imprécision, quant à la date du délit, en dit long sur les lacunes du site en matière de sécurité. En effet, sur un lieu sensible, on devrait s’attendre à des patrouilles au moins quotidiennes. Or, un pan de grillage a été découpé pour pénétrer, ce qui aurait dû attirer l’attention des hommes de garde.

En octobre 2011 nous avions évoqué ce problème à propos d’un camp militaire (3) dont nous n’avions pas donné le nom pour éviter d’inspirer des criminels, voire de mauvais plaisants. Nous signalions l’armurerie d’une caserne située à distance du poste de garde et à proximité de la route principale. D’après nos informateurs, le temps de réaction en cas d’alerte est de 10 minutes. De plus, la fréquence des fausses alertes est devenue telle que les hommes sont peu réactifs.

Ce n’est pas tout ! Autrefois, un tour de garde durait 24 heures. La nuit, des sentinelles étaient postées et une partie de l’effectif restait éveillée pendant que l’autre dormait en tenue, prête à répondre à la moindre réquisition.

Mais aujourd’hui, dans le cadre de la professionnalisation de l’armée, les tours de garde durent une semaine. La nuit, les hommes de garde dorment dans des draps et des alarmes électroniques remplacent les sentinelles. L’efficacité du dispositif s’en voit réduite.

Tout cela s’ajoute aux restrictions de crédits, par conséquent de personnel, dans nos armées. Nos militaires sont désormais dépendant de services « extériorisés », en d’autres termes confiés à des sociétés civiles. Cela y compris dans des zones sensibles.

Ainsi, lors d’un déplacement à Dakar, nous nous sommes aperçus que la force française présente sur place, l’EFS (4), est protégée par une compagnie de gardiennage locale. Ceci s’explique par le manque d’effectifs.

Or, il faut savoir les opérations Serval puis Barkhane, mettant en ligne des soldats français pour combattre au Mali contre les jihadistes être appuyées logistiquement par l’EFS de Dakar. Ce site représente donc une cible possible pour des terroristes liés aux islamistes radicaux du Sahel.

Aussi avons-nous souri, jaune, quand le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a osé dire à l’antenne de RTL : « La très grande majorité des sites est extrêmement bien protégée. Là (NDLR : à Miramas), il y a eu une défaillance qu’il faut condamner et punir ».

La défaillance est inhérente au système politique qui a fait le choix d’une réduction drastique des crédits de la Défense à un moment d’insécurité croissante. Preuve du bien fondé de nos propos, les réductions de crédits et d’effectifs ont été momentanément stoppées à la suite des attentats de janvier dernier.

On peut seulement se demander si le choix de l’armée et d’une protection aussi disproportionnée de la communauté juive sont bien fondés. Privilégier la protection de cette dernière aux dépens de nos casernes et autres sites sensibles n’est-il pas imprudent ? Certes, nous avons compris, qu’en raison des excès d’Israël, les Juifs de France sont devenus des cibles privilégiées des jihadistes. Aussi, la France et les autres Français ont le devoir de protéger cette communauté quand elle est plus particulièrement visée.

Néanmoins, quand nous consacrons 10 000 soldats (5) à cette tâche, nous pouvons encore nous demander si une partie de cet effectif ne serait pas mieux utilisé protégeant nos sites sensibles. Du reste, faisons-nous remarquer, cela servirait indirectement la protection de la communauté juive puisque les armes dérobées pourraient servir un jour dans un attentat dirigé contre elle.

Notes

(1) Les détonateurs sont de petits engins explosifs chargés de faire détonner la charge principale.
(2) Le plastic est un explosif militaire à la fois stable, puissant et modelable d’une utilisation courante pour les sabotages.
(3) Voir « La Défense française en péril »
(4) EFS ou Elément Français au Sénégal.
(5) Le plan Vigipirate renforcé a mobilisé 10412 militaires, 4 100 CRS, 4 700 gendarmes et policiers. Ils ont été mis en place pour protéger 717 sites juifs contre 113 non-juifs. Le plan Vigipirate renforcé coûte un million d’euros par jour.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

Retour Menu
Retour Page Accueil