LA LEÇON DU MESSAGE DE BEN LADEN

Le 25 mars 2010, la chaîne Al-Jazira publiait un nouveau message présenté comme émanant d’Oussama Ben Laden. Pas plus pour celui-là que pour les précédents nous ne sommes en mesure de dire si le chef d’Al-Qaïda en est bien l’auteur. En revanche, le style, le ton et le timbre de la voix ressemblent à ce que l’on connaît de lui.

Annonce message Ben LadenLe message ne dure qu’une minute quinze secondes. Il est si court, qu’on peut l’imaginer tronqué. La plupart des médias en auront retenu ce qui leur apparaît comme l’essentiel : Ben Laden menace de pratiquer la loi du talion à l’égard des prisonniers américains et de les faire assassiner.

Il évoque « le héros Khaled Cheikh Mohammad, que la Maison Blanche a déclaré vouloir exécuter ». Arrêté en mai 2003 et traduit en Justice aux États-Unis, Khaled Cheikh, on s’en souvient, est le planificateur des attaques du 11 septembre 2001. Le jour où les États-Unis auront décidé de le tuer, dit-il, « ils auront pris la décision de faire exécuter tout Américain que nous ferons prisonnier ».

Le message est habile. Il tend à impressionner l’opinion publique américaine, afin de la désolidariser de son gouvernement, en attribuant à ce dernier la responsabilité du meurtre de soldats tombés aux mains de la guérilla sur le sol afghan.

Cependant, étrangement, la plupart des médias occidentaux ont fait l’impasse sur le reste du message.On pourrait réduire le credo de Ben Laden à quelques mots : « Vous êtes le mal, je suis le bien. Vous êtes l’injustice, je suis la Justice ». Il instrumentalise une version revisitée du populisme communiste et va jusqu’à oser dire à propos de la classe dirigeante de Washington : « Ils pensent que l’Amérique, derrière les océans, est à l’abri de la colère des opprimés. Pourtant, la réaction de ces opprimés a été violente le jour du 11 » septembre.

Ces propos ont la force de convaincre l’opinion musulmane parce qu’ils s’appuient sur la frustration et la colère suscitées par la politique des États-Unis. D’autant plus qu’ils sont introduits par un rappel : « Les hommes politiques de la Maison Blanche nous ont traités avec injustice et continuent de le faire, surtout en ce qui concerne le soutien à Israël et à son occupation de notre terre, la Palestine ».

Nul besoin d’en dire plus. Ben Laden, ou qui que ce soit, sait qu’il touche au point le plus sensible de la conscience collective musulmane : le comportement d’Israël à l’égard des Palestiniens et la politique de Washington à l’endroit de l’État hébreu.

Certes, Ben Laden est un manipulateur et l’on peut le soupçonner de ne pas vraiment se soucier du sort des Palestiniens et de leur terre. Mais il tient là l’arme, qui lui permet de poser au justicier et de fasciner une large part de l’opinion musulmane.

Le terrorisme se nourrit toujours de deux causes essentielles: une idéologie et une injustice invivable. Ben Laden fournit l’idéologie et récupère l’injustice. Pour le vaincre, croyons-nous, il faut le couper de l’opinion musulmane et, pour cela, d’abord réduire l’injustice dont souffrent les Palestiniens. Une tâche bien plus importante que la guerre en Afghanistan.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 
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