INTERVIEW
DU
CHEIKH SOBHI TOUFEYLI

Cheikh Sobhi Toufeyli


octobre 2006

Alain Chevalérias et Badih Karhani : Vous avez été secrétaire général du Hezbollah. Pouvez-vous-nous dire quand vous avez exercé cette charge ?

Sobhi Toufeily : De 1989 à 1991.

A.C. & B.K. : Quelles relations entretenez-vous actuellement avec le Hezbollah ?

S.T. : À leur initiative, nos relations sont interrompues depuis 1997

A.C. & B.K. : Pourquoi ?

S.T. : Les racines de notre rupture remontent à plusieurs années. D'une part, je n'étais pas d'accord avec leur façon de gérer les affaires intérieures libanaises, en particulier concernant le dossier de la corruption. Au lieu de protéger les gens, ils travaillaient main dans la main avec les corrupteurs et les corrompus syriens ou libanais. Cela a commencé aux environs de 1992. Pour moi c'était une trahison de notre peuple. En vain, j'ai essayé de les faire changer de méthode. D'autre part, sur le plan extérieur, ils avaient conclu un accord douteux avec Israël en 1993, puis à nouveau en 1996. Ils ont géré ce dossier sur des bases contraires aux principes de la résistance. En d'autres termes, il n'y avait plus de résistance, ou plutôt, elle n'était plus qu'un instrument politique soumis aux intérêts de pays étrangers. Notre conflit est venu de là.

A.C. & B.K. : De quels pays servaient-ils les intérêts ?

S.T. : Essentiellement ceux de l'Iran et de la Syrie.

A.C. & B.K. : Quels accords les chefs du Hezbollah ont-ils conclus avec Israël ?

S.T. : La presse a parlé des textes de façon générale. Ils ont lié les mains de la résistance.

A.C. & B.K. : Des rencontres directes ont-elles eu lieu ?

S.T. : Non.

A.C. & B.K. : Pourquoi n'avez-vous pas été réélu au poste de secrétaire général du Hezbollah en 1991 ?

S.T. : Il y a dans cette affaire beaucoup de choses à prendre en considération. La raison la plus importante est la distance qui apparut entre, d'un côté, ma conception des principes du Hezbollah et, de l'autre, les manipulations iraniennes à l'intérieur du parti. Par exemple, les Iraniens ont poussé le Hezbollah à entrer en guerre contre le mouvement Amal. Ceci est indiscutable. Je peux citer des noms, des dates, des documents. Les Iraniens sont responsables de cette guerre fratricide entre chiites. Quand je dis Iraniens, bien sûr je pense aux responsables politiques iraniens. Cette guerre, c'était la raison principale de notre discorde. Mais eux tenaient les finances. Ils ne pouvaient pas tolérer à la tête du parti quelqu'un qui ne leur obéissait pas aveuglément.

A.C. & B.K. : Qui, en Iran, est responsable de cela ?

S.T. : Excusez-moi, mais à ce stade, je ne veux pas entrer dans les détails. Je ne souhaite pas citer des gens. Mais eux savent qui a déclaré quoi. Quel responsable iranien, par exemple, a parlé devant une dizaine de Libanais et affirmé péremptoire : " c'est cela que nous voulons... "

A.C. & B.K. : Que pensez-vous de l'attaque et de la capture des deux soldats israéliens par le Hezbollah le 12 juillet dernier ? (1)

S.T. : Vous savez, les sionistes n'ont pas manqué une occasion de commettre une mauvaise action contre les Palestiniens ou les Libanais. Le Liban, en particulier, a subi de multiples agressions et il est légitime pour tout Libanais de s'en protéger. Sur la durée, les évènements ont démontré les moyens politiques inefficaces. Les Palestiniens ont tout donné. Signant à Oslo, ils ont fait beaucoup de concessions. Qu'ont-ils reçu en retour ? La mort. Ensemble, Israéliens et Américains essayent depuis un moment de les pousser à la guerre civile. Israël vous met devant deux choix aussi inacceptable l'un que l'autre parce qu'ils mènent tous deux à la mort. Il est donc naturel que le Hezbollah et d'autres capturent des soldats israéliens afin de les échanger contre des captifs qui croupissent sans raison depuis des dizaines d'années dans les geôles israéliennes.

A.C. & B.K. : Vous approuvez donc la capture des soldats israéliens...

S.T. : J'ai des critiques à opposer au Hezbollah dans cette affaire. On peut, par exemple, se demander si la motivation réelle de l'opération était bien de récupérer les détenus aux mains des Israéliens. Si oui, je suis d'accord. En pareil cas les destructions et les morts sont compréhensibles. Mais les gens du Hezbollah eux-mêmes ont dit qu'ils n'avaient pas déclenché cette guerre pour récupérer les captifs. Ils ont dit qu'elle était prévue pour septembre, puis qu'ils l'avaient avancée pour la déclencher en juillet (2). Il doit exister de véritables causes à cette guerre, des causes valables aux yeux des décideurs.

A.C. & B.K. : Bien, mais lesquelles ?

S.T. : Laissez-moi éclaircir ce point. Tout d'abord, je fais une distinction très nette entre ceux qui portent la responsabilité de la décision politique, qu'ils soient au Liban ou ailleurs, et ces jeunes gens enthousiastes, honnêtes moujahidine, qui ont résisté, combattu jusqu'au sacrifice, supportant pendant trente-trois jours le fardeau de cette guerre impitoyable. Ils ont vengé notre dignité bafouée durant un demi siècle et nous leur devons tout notre respect. Je veux parler des décideurs politiques. Leur décision fait peur. Dire un jour : " Nous n'avions pas 1% de doute sur la réaction de l'ennemi…" Puis deux mois plus tard : " Il y avait un plan israélien de guerre destructrice... " Comment quelqu'un peut-il dire une chose et son contraire deux mois après? (3)

A.C. & B.K. : Votre remarque est exacte. Nous l'avons écrit. Mais pourquoi ces contradictions ?

S.T. :
Simplement parce que les vrais buts de la guerre ne peuvent être divulgués au public. Nous sommes entrés en guerre et le pays a été détruit. Il y a des centaines de morts et nous sommes confrontés à une catastrophe sociale et économique. Autre conséquence, la résolution 1701 (4) handicape un peu plus le Liban avec les forces multinationales qui encerclent le pays dans l'air, sur terre et sur mer. Je ne parviens pas à croire que la communauté internationale et les pays de la région se préoccupent des intérêts de mon pays. Ils pensent aux leurs, que ce soit l'Iran, la France, l'Arabie Saoudite, la Syrie, les États-Unis ou Israël. Ou alors je n'y comprends rien.

A.C. & B.K. : Vous considérez donc la présence de la FINUL (5) comme négative...

S.T. :
Ce ne sont pas les textes qui peuvent nous éclairer sur le fond des choses mais le sens des intérêts. Dites-moi si l'intérêt des Américains est de nous rendre service ? Je poserais la même question en ce qui concerne les Israéliens ou les Iraniens ? Bien sûr que non.

A.C. & B.K. : Nous revenons dessus : quelles sont les raisons de la capture des soldats israéliens le 12 juillet par le Hezbollah ?

S.T. : J'ignore les motivations exactes. Mais, ce dont je suis sûr, c'est qu'en raison d'une tension dans le Golfe (NDT arabo-persique) ou ailleurs, quelqu'un dans un pays autre que le Liban, a diagnostiqué qu'il était de son intérêt de provoquer une crise.

A.C. & B.K. : Parlez-vous de la Syrie ou de l'Iran ?

S.T. : Je ne parle ni de la Syrie ni du Liban. Nous ne sommes, au Liban, qu'un terrain d'expérimentation.

A.C. & B.K. : L'Iran donc. En tant que chiite, acceptez-vous le système du " Velayat-e-faqih ? " (6) (ou Wilayat al faqih)

S.T. : Non, parce que le " Velayat-e-faqih, " en droit musulman, n'a pas de base légale. Il n'existe ni dans le Coran ni dans la noble Sunna (7). La majorité des théologiens chiites ne sont pas d'accord avec cette théorie

A.C. & B.K. : Êtes-vous sûr que la majorité des théologiens chiites est contre ?

S.T. : Oui, comme je vous l'ai dit, par ce qu'il n'y a pas de base théologique. Or tout docteur de la loi a besoin d'éléments pour fonder son argumentation. Quand les docteurs de la loi adoptent un avis, ils se demandent quelle est la preuve.

A.C. & B.K. : Bien sûr, mais le chiisme permet justement à un " marjaa " (8) d'innover. En d'autres termes, de rendre un avis même s'il n'existe pas de précédent...

S.T. : On ne peut pas faire de " l'ijtihad " (9) qui contredise le texte du Coran. L'alternative au "Velayat-e-faqih," c'est la " choura, " (10) ce que l'on connaît en Occident sous le nom de démocratie. Cela signifie que le pouvoir revient à la "oumma."(11) Pour savoir si le pouvoir revient au "faqih" (12) ou à la " oumma, " il faut lire le Coran. Il est dit : " [Pour ceux] qui répondent [à l'appel] de leur Seigneur, accomplissent la prière, se concertent sur leurs affaires et dépensent [en œuvres charitables] ce que nous leurs avons attribué" (13). Le noble Coran a donné la prérogative du choix et de destitution de ses chefs à la " oumma. " Plus loin, on lit encore : " Les croyants et les croyantes sont amis les uns des autres. Ils commandent le bien, déconseillent le mal, accomplissent la prière, s'acquittent de l'aumône légale et obéissent à Dieu et à son prophète. Voilà ceux à qui Dieu fera miséricorde. Il est, en vérité, puissant et sage " (14). Quand la prérogative d'ordonner le licite et d'interdire l'illicite est donnée à la " oumma, " hommes et femmes confondus, le plus haut degré relève de la nomination et de la destitution des dirigeants. Voilà quelles sont les preuves du Noble Coran. Nul ne peut venir, dire que la " oumma " n'a aucun rôle et remettre le pouvoir à "l'ombre d'Allah sur terre"(15).

A.C. & B.K. :
C'est pourtant ce qu'ont fait les responsables religieux iraniens. Vous voulez dire qu'au regard des lois musulmanes le "Velayat-e-faqih" serait-ce illégal ?

S.T. : Quand les Iraniens ont rédigé leur constitution, sous Khomeiny, ils ont été contraints de donner le pouvoir à la " oumma. " Selon la constitution iranienne, un " majlis khoubara' al fouqaha', " ou comité d'experts, des docteurs de la loi élus par la " oumma, " ont pour fonction de désigner, éventuellement de démettre, le " wali al faqih " (16). Ce comité d'experts a bien reçu le pouvoir de la " oumma. " Que sur le terrain le système ne fonctionne pas exactement comme cela n'est pas nouveau. Tous les régimes arabes, plus largement tous les gouvernants musulmans en font autant. Mais il y a là un point essentiel. Les Iraniens n'ont pas pu codifier le "Velayat-e-faqih" dans la constitution. Ils ont été finalement contraints de revenir à la théorie du noble Coran et désigner la " oumma " comme véritable maître du pays. Aussi, y a-t-il là une contradiction. Car si en théorie la " oumma " est responsable, détentrice de la décision et du pouvoir, le " wali al faqih, " dans la pratique, est l'alpha et l'oméga, le maître absolu du pays.

A.C. & B.K. : Qui est votre " marjaa " ?

S.T. : Je n'ai pas de " marjaa. "

A.C. & B.K. : Quelles sont vos relations avec les autorités libanaises ?

S.T. : Je ne les respecte pas.

A.C. & B.K. : Pourquoi ?

S.T. : Nous sommes sensés accepter ce qui est juste et vrai. La corruption ronge le Liban. Rien n'est sain dans ce pays. Personne ne respecte la loi. Dans ces conditions, comment respecter les gens au pouvoir ?

A.C. & B.K. : Cela veut-il dire que vous n'avez pas de relations avec les autorités ?

S.T. :
Supposez que vous représentiez une partie du pays, même si vous agissez de manière déshonnête, celui qui veut servir sa patrie, la sauver, est obligé de traiter avec vous. Comme on dit, le pays est entré dans son dixième mois de grossesse. Dieu sait de quoi il va accoucher. Peut-être d'un ogre. Pendant ce temps, les responsables politiques attisent les tensions interconfessionnelles. Ils se rendent ainsi service. L'un parle de manière à provoquer la colère d'une confession, le leader d'en face répond et ainsi de suite. Je suis inquiet pour l'avenir parce que nous ne construisons pas l'État libanais. Nous courons à notre perte sans savoir quelle forme elle va prendre.

A.C. & B.K. : Quelle est la solution pour vous ?

S.T. : Tout d'abord, nous avons besoin que les lois soient respectées. Nul, puissant ou faible, ne doit déroger aux lois. C'est le minimum nécessaire. Nous avons aussi besoin d'une justice indépendante, qui ne soit pas soumise aux appels téléphoniques des personnalités influentes. C'est le téléphone qui condamne à mort ou ouvre les portes de la prison. La réalité est amère. Au Liban, la Justice est comme un revolver dans la main d'un voleur.

A.C. & B.K. : Sur ce plan, un mandat a été émis contre vous. Où en est son application ?

S.T. : C'est un bon exemple. Mon dossier a été communiqué au " Majlis Al-Aadli " (Conseil de Justice), la plus haute instance judiciaire du pays. Depuis 9 ans, en vain, je leur demande de me juger(17).

A.C. & B.K. : Pourtant, ne m'avez-vous pas dit toujours rencontrer des officiels ?

S.T. : Oui, certains viennent même me voir. En fait, pour l'ancien régime comme pour le nouveau, je suis un problème parce que je me suis élevé contre le pillage du pays. Sous l'ancien régime, le Premier ministre, le Président de la République et le Président du Conseil s'accommodaient très bien cela. J'ai entendu le Premier ministre Rafic Hariri d'alors dire : " Le tiers de mes ministres sont des voleurs ". Le président du Parlement a affirmé de son côté : " Ils volent, alors nous volons " et cela dans un micro quand il s'adressait à la foule. C'est ça le Liban. J'ai exprimé ma désapprobation. Mon peuple doit être respecté. Bien sûr, cela se passait grâce à la complicité des services de renseignement syriens et des autorités libanaises. Mes contestations ont provoqué leur colère. Quant aux Iraniens, faisant leurs propres calculs, eux aussi ont estimé mes propos dangereux pour eux. Alors, ils ont attaqué.

A.C. & B.K. : Comment cela ?

S.T. : En partant d'ici, vous pouvez voir une petite colline en bas du village. Sur cette colline, il y a une mosquée avec son minaret et une école. Nous étions dans l'école quand ils ont attaqué. Nos agresseurs comptaient des hommes du Hezbollah, des soldats de l'armée libanaise et des Iraniens. Ils ont tué des gens innocents et après cela ils nous ont accusés d'être des criminels (18). Depuis cette attaque, nous les invitons à nous rendre ensemble devant la Justice pour qu'elle tranche.

A.C. & B.K. : Quand cela a-t-il eu lieu et combien y a t'il eu de morts ?

S.T. : C'était en février 1998 et nous avons eu 7 ou 9 victimes.

A.C. & B.K. :
Concernant l'Irak, vous avez une certaine proximité avec ce pays. En Irak, de qui vous sentez-vous le plus proche ? De Moqtada Sadr (19) ou de l'ayatollah Sistani (20) ?

S.T. : Je suis en désaccord avec la politique de Sistani car elle est en harmonie avec celle des Iraniens qui soutiennent l'occupation américaine. Vous savez que les Américains ne sont entrés en Irak qu'après s'être assurés que les Iraniens ne leur seraient pas hostiles. Vu de loin, avec la réserve que sur place notre vision serait peut-être différente, la position la plus saine est celle de Sayyed Moqtada Sadr.

A.C. & B.K. : Etes-vous pour le maintien du système confessionnel (21) au Liban ou pour sa suppression ?

S.T. : Le confessionnalisme politique est un crime au Liban. J'appelle à la suppression du confessionnalisme parce que je crois que nous devons choisir nos gouvernants en fonction de leur honnêteté, de leur droiture, de leur équité et de rien d'autre. Mais si l'on craint la domination politique d'une partie de la population sur l'autre, je préfère encore le confessionnalisme politique pour limiter le despotisme. Le plus important, à mes yeux, c'est de réduire la corruption et d'élever le niveau de la population. On ne veut plus de voleurs pour nous gouverner.

A.C. & B.K. : Le Hezbollah est pour la dislocation de l'État d'Israël et la création d'un État multi religieux. Ses dirigeants préconisent le renvoi à l'étranger des juifs qui sont arrivés après 1948. Quelle est votre position ?

S.T. : L'instauration de l'entité sioniste en Palestine est-il un projet humanitaire ou politique? Tout le monde comprend que l'entité israélienne a joué un rôle important dans l'écrasement de la région, compromettant son développement, et empêchant l'installation de régimes politiques respectables. Elle répand le chaos et la corruption. N'importe quel être doté de bon sens, aimant ses enfants et son pays, ne saurait accepter pareille entité et pas seulement au Moyen-Orient mais n'importe où dans le monde.

A.C. & B.K. : Vous êtes donc pour la suppression de l'État d'Israël...

S.T. : Je suis pour la restauration de la justice. Je suis contre le crime. Le rôle israélien dans la région est criminel. Je ne suis pas contre les juifs, les musulmans ou les chrétiens. J'accepterai même qu'un juif gouverne le Liban s'il est juste. Mais le jeu criminel d'Israël doit être rejeté par tout le monde, n'importe quel être qui se respecte doit le refuser. Ne croyez-vous pas ?

A.C. & B.K. : Ne vaudrait-il pas mieux d'envisager une solution de justice ?

S.T. : La justice demande des gens qui se sacrifient. Jésus, fils de Marie, ne pouvait pas tricher et vivre comme les autres

A.C. & B.K. : Puisque vous prenez l'exemple de Jésus-Christ, justement, il n'a pas utilisé d'armes pour répandre sa foi.

S.T. : Il a utilisé des armes plus puissantes que les armes à feu. L'important c'est l'efficacité de ces armes. Elles peuvent se réduire à un mot ou à une prise de position…

A.C. & B.K. : C'est bien ce que nous voulions dire. Imad Moughnieh (22) est-il un terroriste ?

S.T. : C'est George Bush le terroriste. Tony Blair est lui aussi un terroriste. Ce qui se passe en Irak est-il juste ? Envoyer des bombes soit disant intelligentes qui tuent des enfants au Liban, cela est-il juste ? C'est un jeune homme qui, à un moment de sa vie, pour défendre une juste cause, a utilisé une mauvaise méthode. Une méthode que certains approuvent et d'autres désapprouvent. Il y aurait des milliers de gens à juger avant Imad Moughnieh? (Lire: Imad Moughnieh est-il mort?

A.C. & B.K. : Les États-Unis ont classé le Hezbollah organisation terroriste. Malgré les pressions américaines, les Européens ont refusé de les imiter. Néanmoins, si les pays européens rangeaient le Hezbollah dans la catégorie " terroriste, " quelles pourraient être les conséquences d'une telle décision ?

S.T. : Nous disions tout à l'heure que l'avenir des peuples doit être décidé dans le dialogue et la sagesse. Mais, aujourd'hui, les Américains refusent tout dialogue. Je ne pense pas au dialogue politique ou diplomatique, mais a celui entre les civilisations. Eux lui préfèrent le choc des civilisations. Classer les gens dans la catégorie terroriste et obtenir des résolutions du Conseil de sécurité pour mobiliser des armées, cela n'a rien à voir avec la discussion, l'humanisme, la raison et la sagesse. Quand on est dans un contexte de guerre, la justice, la diplomatie, les médias et l'économie sont au service de la guerre. Je n'aime pas cela mais, jour après jour, les Américains entraînent tous les hommes dans ce conflit. Nous voyons le début de cette guerre, mais elle n'aura pas de fin et ceux qui paieront le plus seront les gens de cette région et ceux du centre Est de l'Europe, bien avant les Américains. Si l'Amérique parvient à entraîner les Européens sur la même ligne qu'elle, alors elle aura gagné contre eux en leur imposant sa politique et en les recrutant dans son armée. Certains Européens peuvent penser qu'ils sont du même moule que les Américains. Ils peuvent croire qu'ils ne vont pas s'entretuer entre Américains et Européens parce que le loup ne dévore pas son frère. Mais l'histoire dit le contraire. Napoléon et Hitler ont dévoré les Européens avant d'en dévorer d'autres. Si c'est aujourd'hui notre tour, ce sera le vôtre demain. Voila pourquoi il est de l'intérêt de l'humanité d'empêcher la domination d'un despote. Marchant avec les Américains, vous travaillez contre vos intérêts. J'ai peut être tort, mais c'est ainsi que je vois les choses.

(On trouve aussi Sobhi Toufeyli écrit : Toufeili, Toufeily, Toufaili, Toufayli, Toufaily, Tufeyli, Tufeili, Tufeily, Tufaili, Tufayli, Tufaily, Al-Toufeili, Al-Toufeily, Al-Toufaili, Al-Toufayli, Al-Toufaily, Al-Tufeyli, Al-Tufeili, Al-Tufeily, Al-Tufaili, Al-Tufayli, Al-Tufaily)


NOTES

(1) Il s'agit bien sûr du 12 juillet 2006.
(2) Très précisément, cheikh Hassan Nasrullah (Nasrallah) a déclaré que la capture des soldats israéliens, en tant que déclencheur des hostilités, anticipait sur les plans d'une offensive israélienne contre le Liban prévue en septembre 2006.
(3) De fait, Nasrullah (Nasrallah) affirmait d'abord la capture de soldats israéliens lancée par anticipation sur le déclenchement d'une offensive israélienne prévue en septembre. Quelques semaines plus tard, il prétendait que soupçonnant l'ampleur de la réaction israélienne, il n'aurait pas capturé les soldats israéliens.
(4) Adoptée le 11 août, la Résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, augmente la taille de la FINUL (les forces des Nations unies stationnées au sud Liban), renforce son mandat et appelle au déploiement des forces armées libanaises jusqu'à la frontière israélienne. De surcroît, les hommes du Hezbollah ne peuvent plus se déplacer armés dans le sud Liban.
(5) La FINUL ou Force Intérimaire des Nations unies au Liban. Elle est présente dans la région depuis 1978.
(6) Le " Velayat-e-faqih " (en persan) ou Wilayat al faqih (en arabe) est le système créé en Iran confiant l'essentiel du pouvoir à la hiérarchie religieuse chiite du pays.
(7) La Sunna ou Sunnah concerne tout ce qui touche aux paroles et aux agissements de Mahomet en tant que modèle pour les musulmans. Il est a remarquer, qu'habituellement, les religieux chiites présente moins comme une référence la Sunnah.
(8) Le " marjaa, " ou " source d'imitation, " est un haut responsable religieux capable d'interpréter les textes sacrés sans se référer à un précédent. Chez les chiites, leur rôle est très important parce que " l'ijtihad, " l'interprétation évolutive des textes, est demeuré ouvert.
(9) " L'ijtihad, " ou interprétation évolutive des textes n'est plus pratiquée en théorie que par les chiites. Les sunnites ont " fermé la porte de l'ijtihad " depuis le XIème siècle.
(10) La " choura " ou assemblée est la référence en islam pour la concertation à la base. Elle est héritée du système tribal arabe.
(11) La " oumma, " du mot " oumm " mère, est la communauté des croyants musulmans.
(12) Le " faqih " est un docteur de la loi islamique.

(13) Il s'agit du verset 38 de la sourate 42 du Coran. Il faut retenir les mots " se concertent sur leurs affaires " qui, pour les musulmans sont la preuve d'un appel à la démocratie dans l'islam. Ces termes sont inscrits dans plusieurs Parlements arabes pour légaliser ceux-ci au regard de la religion. La traduction de ce verset et la suivante sont empruntées à l'oeuvre de cheikh Si Boubakeur Hamza dans " Le Coran, traduction nouvelle et commentaires " publiée chez Fayard Denoël.
(14) Dans le verset 71 de la sourate 9.
(15) " L'ombre d'Allah sur terre " en arabe " zill allah, " est l'expression employée par le chiites pour désigner un " marjaa. "
(16) Le guide de la Révolution islamique, aujourd'hui Ali Khamenei.
(17) D'après les autorités, cheikh Sobhi Toufeily est poursuivi pour avoir mis en péril la sécurité nationale en organisant une campagne de désobéissance civile.
(18) D'après le journal arabe " Al Charq Al-Aoussat " (Al Charq Al Awsat) du 25 septembre 2003, cheikh Sobhi Toufeyli ayant occupé avec ses hommes un complexe religieux appartenant au Hezbollah, ce dernier a organisé un coup de main avec l'aide de l'armée libanaise pour récupérer les lieux. En outre, au cours des affrontements, un officier de l'armée libanaise a été tué.
(19) Moqtada Sadr est le chef du mouvement " Jeich al-Mahdi, " l'armée du Mahdi, un mouvement chiite très actif dans la banlieue de Bagdad dite Sadr City. Ses hommes se sont battus à plusieurs reprises contre les forces américaines.
(20) L'ayatollah Ali Sistani est l'autorité religieuse suprême pour les chiites d'Irak. Il est opposé au " Velayat-e-faqih. "
(21) Le système confessionnel permet de répartir les fonctions électives et administratives entre les différentes communautés confessionnelles du Liban. Il est une garantie pour empêcher une communauté de s'imposer sur les autres.
(22) Imad Moughnieh (Moughannieh, Moghnieh, Mughniyah) est accusé d'être impliqué dans l'attaque contre l'ambassade et la base des Marines américains au Liban en 1980. Il fait aussi partie des suspects présentés dans l'affaire de l'attentat anti-juif perpétré en Argentine en 1994. Cette dernière affaire vient d'être remise au goût du jour par la justice argentine après douze ans de valse hésitation.

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