Conflit israélo-arabe :
cynisme contre cynisme

On attend d’un philosophe qu’il soit au-dessus des conflits partisans et, quand il prend parti, qu’il le fasse l’oeil rivé sur le fléau de la Justice et non pas en choisissant une faction contre une autre, au nom de ses sentiments personnels. Le 10 mai, dans une tribune publiée par le CRIF (1), Bernard-Henri Lévy s’exprimait sur la réconciliation entre le Hamas et l’Autorité palestinienne quand, depuis juin 2007, le premier étant retranché dans Gaza, d’où il a évincé le second ; l’autre plaidant la légitimité dans la Cisjordanie, occupée par Israël. Comment ne pas saluer un rapprochement qui, rendant son unité au peuple palestinien, augure d’une relance possible des négociations de paix... si l’État hébreu le veut. Que nenni ! Lévy ne l’entend pas de cette oreille. « C’est une catastrophe pour Israël, affirme-t-il, qui voit remise en selle une organisation dont le mode d’expression diplomatique privilégié consiste, depuis son putsch de 2007, à tirer des missiles sur les civils de Sderot (2)... » Certes, Hamas n’est pas très fréquentable, mais si l’on caricature sa politique, il faut pour être lisible agir de même à l’endroit de celle d’Israël. Dire, par exemple, l’État juif installé dans un cynisme méprisant à l’égard des Palestiniens, dans une position de refus systématique de toute avancée vers la paix. À nos yeux, aux yeux des gens de bon sens, Lévy, surnommé BHL, sans doute pour faire grande surface, n’a rien d’un philosophe. Ce n’est qu’un propagandiste de la politique de l’État d’Israël, parfois talentueux, pas toujours, mais certainement pas une référence... Parce qu’il a reçu les deniers du Temple.

En France, plus équilibré depuis le changement de patron, le ministère des Affaires étrangères , par la voix d’Alain Juppé, a lui aussi estimé que la réconciliation entre les deux frères ennemis palestiniens constituait « une chance » pour la paix.

En revanche, dès l’annonce du rapprochement, le 27 avril 2011, un groupe de membres du Congrès américain, affiliés aux lobbyistes sionistes, réclamait le blocage de l’aide de leur pays à l’Autorité palestinienne. À la virulence de la réaction des partisans d’Israël, on comprend l’entretien de la division des Palestiniens, un axe essentiel de la politique d’Israël.

L’affaire n’est pas nouvelle. À sa création par cheikh Ahmed Yassine, en 1987, Hamas, filiale des Frères musulmans, a bénéficié de l’aide discrète du Mossad israélien. À l’époque, les Israéliens voulaient dresser un adversaire contre Yasser Arafat dans son propre camp et, pour ce faire, n’ont pas craint d’instrumentaliser un mouvement religieux radical (3),. Aujourd’hui, la stratégie reste la même : diviser pour régner. Les Israéliens ont seulement interverti les rôles du « très méchant » et du « un peu moins méchant ».

Ce cynisme d’Israël et la haine qu’il déchaîne au Moyen-Orient contre l’Occident, son protecteur, commence à inquiéter chez nous. Nous nous retrouvons en effet exposés aux coups du terrorisme, principalement en raison de notre indulgence à l’égard de l’État hébreu.

Faut-il attribuer à cette prise de conscience l’évolution récente de la politique française à l’égard d’Israël ?

Dans une approche entourée de discrétion, certes, Nicolas Sarkozy fait travailler Juppé à la mise sur pied d’une conférence sur la Palestine au mois de juin. Il compte se placer ainsi à la tête d’une relance du processus de paix. Le coup apparaît téméraire, mais si, contre toute attente, il réussissait, Sarkozy partirait en campagne présidentielle avec un bel avantage.

En attendant la presse restant sous la férule des amis de Bernard-Henri Lévy (4),, Sarkozy a quelques soucis à se faire, car travaillant à un plan de paix qu’Israël fait tout pour éviter, il doit savoir que tous les médias, pour une fois unanimes, vont lui savonner la planche.

En attendant, tout récemment, nous avons eu un bel exemple de l’occultation des informations, quand elles font ombrage à la réputation d’Israël.

Le 15 mai, les Palestiniens célébraient la « Nakba », la catastrophe en arabe, pour commémorer l’expulsion de 700 000 d’entre eux de leurs villages par les Juifs, en 1948.

Sur le plateau du Golan, côté syrien, et au sud Liban, dans les deux cas face aux barbelés de frontières dessinées par Israël, des milliers de Palestiniens sont venus manifester. Tous les observateurs confirment qu’ils n’avaient pas d’armes.

Sur le Golan, selon les témoins, plusieurs manifestants sont parvenus à entrer sur le territoire occupé par Israël. Les soldats de Tsahal ont tiré, tuant deux hommes. Dans le sud Liban, sans s’embarrasser de légalité, les Israéliens ont aussi tiré sur la foule massée en territoire libanais, faisant dix morts. 12 morts et des centaines de blessés en une seule journée !

Voilà qui aurait mérité de s’appesantir dans le journal télévisé quand le coupable est un État qui se targue de défendre des « valeurs démocratiques ». Car, croyons-nous avoir compris, c’est exactement ce que l’on reproche, avec raison, aux États arabes : tirer sur des foules désarmées.

Il faut dire, dans cette affaire encore, la duplicité et le cynisme de la Syrie font écho à ceux d’Israël. Dans le Golan, sous contrôle des services de renseignements syriens, avons-nous appris, des autobus ont transporté les manifestants des camps de réfugiés palestiniens jusqu’à la frontière.

Dans le sud Liban, ce sont encore des bus syriens qui ont été utilisés pour acheminer les manifestants, mais sous supervision du Hezbollah, allié du régime de Damas.

Or, et c’est là l’ignoble, les décideurs syriens comme les chefs du Hezbollah, connaissant la réaction prévisible des Israéliens, savaient envoyer les Palestiniens à l’abattoir. Cynisme contre cynisme.

 

Notes


(1) CRIF : Conseil représentatif des institutions juives de France.
(2) Ville israélienne régulièrement touchée par des tirs de roquettes, et non de missiles, tirées de Gaza.
(3) La lune de miel n’a pas duré longtemps entre Israël et le Hamas puisque, en 1989, Ahmed Yassine était arrêté pour incitation à la violence. Libéré en 1997 à la suite d’une rocambolesque bavure du Mossad en Jordanie, il a été assassiné à Gaza, lors d’une attaque ciblée israélienne, le 22 mars 2004.
(4) Bernard-Henri Lévy est un bon exemple de cette prise de contrôle de nos médias par les réseaux sionistes. Il est à la fois président du conseil de surveillance d’Arte, membre du conseil de surveillance du « Monde » et éditorialiste au « Point », pour ne citer que quelques-uns de ses accès.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

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