EN FRANCE,
LE RISQUE RÉVOLUTIONNAIRE

Par Alain Chevalérias

mai 2009

Il y en France « un risque révolutionnaire », a dit Dominique de Villepin le 19 avril 2009 sur Europe 1. La France risque-elle vraiment de passer à l’état insurrectionnel ? Des émeutes organisées peuvent-elles faire tache d’huile, s’étendant en coordination avec des actions terroristes ? Il faut pour cela des conditions. Le Centre de Recherches sur le terrorisme, aux travaux duquel nous participons, part d’un principe : « Le terrorisme et les soulèvements à caractère insurrectionnel, pour prendre une ampleur significative, ont besoin de deux causes essentielles : une injustice vécue comme intolérable et une idéologie porteuse de violence ». Les composantes de ce cocktail sont-elles présentes en France?

Continental, trust industriel produisant des pneus, s’apprête à fermer les usines de Clairoix, en France, et d’Hanovre, en Allemagne. Dans le même temps, Continental augmente sa production à Timisoara, en Roumanie. Sur le site roumain, le nombre de pneus fabriqués est passé de 1,2 million en 2000, année de création de l’usine, à 12 millions d’unités en 2008. Il devrait encore augmenter cette année. Voilà pour l’injustice !

L’actuel patron de l’usine roumaine s’appelle Thierry Wipff. Jusqu’en 2007, il présidait aux destinées de Clairoix. Comble du cynisme, il avait obtenu de ses employés le retour aux 40 heures hebdomadaires « pour sauver les emplois ».

Dans l’Union européenne, dont la Roumanie fait partie, nous assistons à une échelle réduite aux effets de la mondialisation. Les entreprises délocalisent là où la main d’oeuvre coûte le moins cher. Les employés, laissés sur le carreau et confrontés à un marché du travail exsangue, sont destinés au chômage de longue durée.

Résultat, la colère. Mardi 21 avril, les salariés de l’usine Continental de Clairoix saccageaient la sous-préfecture de Compiègne, dont ils dépendent. Provoquées par des annonces de licenciements de personnel, chez 3M, Caterpillar, Sony ou Scapa, les employés séquestrent des membres de la direction.

Ces violences sont intolérables. Se retrouver sans espoir de gagner décemment sa vie ne l’est pas moins. Quand Nicolas Sarkozy stigmatise les séquestrations de patrons, il oublie l’essentiel : lui et ses prédécesseurs ont permis la mise en place d’une violence plus intolérable encore, parce que légalisée, celle du mondialisme destructeur de la protection nationale.

Reste à s’interroger sur l’existence en France de la deuxième composante du cocktail insurrectionnel : l’idéologie.

Sortant de sa réserve habituelle, « Le Figaro » du 24 avril publiait une enquête sous le titre : « Séquestrations : la main de l’extrême gauche ». Un dirigeant de la CFDT leur avait dit : « C’est un secret de polichinelle que de dire que les meneurs de la fronde des Continental à Clairoix sont encartés chez LO ». Par LO on entend « Lutte Ouvrière », le parti trotskyste d’Arlette Laguiller. Un responsable de la CGT va dans le même sens : « Les militants du NPA sont partout où il y a de la misère et la peur de l’avenir », affirme-t-il. Le NPA, « Nouveau Parti Anticapitaliste », s’illustre sous l’égide d’Olivier Besancenot.

En clair, cela signifie que la colère aidant, le contrôle des troupes échappe aux syndicats classiques, y compris jusqu’alors le plus à gauche, la CGT. Des professionnels de la subversion prennent le relais. L’extrême-gauche, pour la nommer, fournit le cadre idéologique. Or, ce dernier est construit comme une fusée à deux étages.

Le premier étage démarre à la dénonciation des injustices engendrées par le mondialisme. Passant en vitesse de croisière, il se propulse à coups de slogans anti-libéraux. Révoltés par les outrances de l’hyper-capitalisme, refusant l’ultra-libéralisme, certains, de droite et de la « gauche conservatrice », sont tentés de suivre ces nouveaux prophètes.

Là repose le piège tendu par l’extrême-gauche. Refusant l’opposition de principe entre l’économie libre et l’ultra libéralisme, ils font l’amalgame entre les entrepreneurs, petits ou moyens, et les Rockefeller, les Rothschild et autres maîtres de la finance internationale. Prenant argument des outrances des seconds, ils condamnent les premiers et avec eux l’économie de marché.

Forts d’un soutien acquis dans la confusion et dans la peur, l’extrême-gauche souhaite alors passer à l’allumage du second étage de la fusée : celui d’un marxisme révisé, sous couvert d’alter-mondialisme. Un autre mondialisme qui ferait de notre planète une immense Union Soviétique.

Pour arriver à cet objectif, il existe cependant un passage obligé, le « Grand Soir », la Révolution, comme disent les tenants de cette gauche.
Cela n’a aucun sens, vous diront certains. Répondez-leur qu’il y a les faits.

Le 4 avril, le sommet de l’OTAN se déroulait à Strasbourg. Comme la majorité des Français, l’extrême-gauche est hostile à cette organisation. Le grand nombre parce qu’elle réduit un peu plus notre indépendance nationale face aux États-Unis. L’extrême-gauche, en revanche, voit dans l’OTAN une structure qui gêne leurs folles aspirations à la domination du monde par la Révolution.

A Strasbourg, les militants de celle-ci ont fait la démonstration de leur capacité de nuisance. Des jeunes cagoulés, armés de barres de fer et protégés des gaz lacrymogènes, ont attaqué la police. Ils ont mis la ville à feu et à sang, saccageant deux quartiers et détruisant, entre autres, un hôtel Ibis et le poste de douane situé entre la France et l’Allemagne. Pendant plusieurs heures, des scènes de guerre urbaines ont pris place au coeur de la vieille cité alsacienne.

Ces faiseurs de troubles se dénomment eux-mêmes les « Black Blocs ». Bruno Beschizza, secrétaire général d’un syndicat de police, déclare : « Leur technique consiste à créer du désordre dans l’espoir que tout dégénère pour vivre, un jour ou l’autre, le Grand Soir. Ce sont des mômes de vingt ans qui rêvent de revivre 1919, quand les Bolcheviques créaient des révolutions un peu partout ».

La veille, ils étaient présents autour du campement octroyé par les autorités aux trois ou quatre mille contestataires pacifistes anti-OTAN. On reconnaissait leurs tentes aux drapeaux noirs, couleur des anarchistes, et au marteau planté dans le croissant d’une faucille sur les oriflammes rouges.

A Strasbourg, comme au cours des autres manifestations de ce type, les Black Blocs n’agressent pas les militants pacifistes. Ils cohabitent à leurs côtés. Ils les protègent, même, si la police les charge.

Dernier point révélateur, à l’entrée du camp des contestataires, à Strasbourg, selon le témoignage de Jean-Marc Leclerc du « Figaro », les Black Blocs avaient écrit sur un panneau : « Free Rouillan-Coupat », libérez Jean-Marc Rouillan et Julien Coupat. Revendica-tion lourde de sens. Rouillan est un ancien membre du groupe terroriste d’extrême-gauche, Action Directe. Quant à Coupat, il est sous les verrous, mis en examen dans l’affaire des sabotages de TGV.

Après un tel aveu, les amis de Coupat ont bonne mine quand ils hurlent à l’innocence de ce dernier. Du reste, quelques indices rendent cette innocence chaque jour un peu plus douteuse.

Début 2008, Coupat s’était rendu au Canada pour franchir clandestinement la frontière avec les États-Unis avec sa compagne Yildune Levy. La police canadienne vient de révéler qu’à bord de la voiture qui leur avait servi, elle avait trouvé une paire de « gants 25000 V », normalement destinée à la manipulation des lignes à haute tension.

La police française vient, pour sa part, de découvrir, sur l’ordinateur de la jeune femme, un manuel sur la fabrication des explosifs de guerre. On se demande ce qu’une archéologue, sa profession déclarée, pouvait bien faire avec un tel livre.

Enfin, Coupat est incapable d’expliquer la raison de sa présence et de celle de son amie dans les environs d’un sabotage du TGV au cours de la nuit du 7 au 8 novembre dernier.

En outre, le juge d’instruction, Thierry Fragnoli, a remarqué que cette nuit du 7 au 8 novembre correspond, dans le calendrier russe, aux dates du 25 au 26 octobre 1917 quand, Trotski, déclenchant l’insurrection de Petrograd, fit détruire les ponts et les gares de la cité.

Comme l’a compris Villepin, il existe bien en France un risque révolutionnaire. Il est alimenté, d’un côté par les tenants du mondialisme, qui génèrent l’injustice, de l’autre par l’extrême-gauche, qui produit une idéologie porteuse de violence.

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

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