LINVASION DE LAFGHANISTAN PAR LES RUSSES |
En décembre 1979, les troupes soviétiques entraient en Afghanistan sortant, pour la première fois depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, des frontières du Pacte de Varsovie. Les affrontements qui suivirent ont libéré la pulsion jihadiste dont les prolongements se manifestent aujourdhui sur le continent européen. En tant que journaliste, Alain Chevalérias a effectué cinq voyages en Afghanistan à cette époque, totalisant ainsi près de trois ans dans les maquis, en particulier dans la région de Mazar-i-Sharif. |
Dans la nuit du 24 au 25 décembre 1979, deux divisions de larmée de lair soviétique débarquaient à Kaboul. Moscou affirmait intervenir à la demande du gouvernement afghan. Pourtant, les spetsnaz (1) semparaient du palais et exécutaient le Président en titre, Hafizullah Amin, un communiste qui avait cessé de plaire au Kremlin. Ils le remplaçaient par Babrak Karmal, un autre communiste qui, en délicatesse avec Amin, vivait en exil en Union Soviétique.
Pauvre en moyens, divisée et mal encadrée, ce que lon va appeler la résistance afghane jouit néanmoins de trois atouts 1/ la rusticité de sa population 2/ le soutien du Pakistan et surtout des États-Unis 3/ une religion, lislam, qui leur donne un cadre idéologique. Laide américaine est dautant plus efficace quelle a été préparée depuis longtemps. Washington a toujours craint une subversion communiste dirigée contre ses alliés de la région, dont le Pakistan. Dans ce but, non loin de Peshawar (2), en 1957, un centre dentraînement à la guérilla a été créé par la CIA avec laide de lISI (3) afin dy former des volontaires des pays asiatiques (4) À nos yeux, les Américains ont alors raison de soutenir la résistance afghane, ne serait-ce que pour assurer la sécurité du Golfe arabo-persique, qui baigne les côtes du Pakistan et par où transite la moitié de nos approvisionnements en pétrole. Mais ils vont trop loin. Au moins dès 1983, la CIA fait appel à des islamistes arabes proches des Frères musulmans (5) pour venir combattre en Afghanistan. Sans quil y ait une collaboration véritable, Oussama Ben Laden, alors un jeune homme, va prospérer dans ce milieu des Arabes dAfghanistan. À Washington, on compte ainsi faire de la cause afghane la cause de tous les musulmans. Côté soviétique, loccupation savère coûteuse en hommes tués, en moyens détruits et handicape Moscou sur la scène internationale. De plus, rien ny fait et en dépit des bombardements, 80% du territoire afghan reste sous le contrôle de la résistance.
Le régime communiste ne tombe quen 1992 sous les assauts des hommes du commandant Massoud. Les Américains se satisfont de ce succès et abandonnent lAfghanistan à son sort. Quant aux Arabes invités au conflit, Washington croit quils vont retourner à une vie paisible. Mais ils ont désormais le goût du sang dans la bouche. Le goût du sang et une idéologie. Cest une grave erreur de les avoir laissés en Afghanistan. En effet, dans les maquis, dès 1985, nous les avons entendus projeter de poursuivre « le jihad » contre lOccident et ses alliés après la victoire contre les Soviétiques. Aujourdhui, nous payons aussi la légèreté des Américains.
Alain Chevalérias
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