LES PAYS DU GOLFE SONT NOS ALLIÉS

par Jean Isnard

Juin 2005

 

" Tirs croisés, " sorti en poche en mai, livre de Caroline Fourest, cosigné par Fiammetta Venner, pose, parmi d'autres un dangereux postulat.

 On lit : " L'islamisme est assis sur un tas d'or, de l'or noir (dont les ressources) proviennent en grande partie des pays du Golfe. "

Selon les auteurs, en raison de leurs besoins en pétrole, les États-Unis sont associés à l'Arabie Saoudite par un lien de "dépendance mutuelle" et ne peuvent faire face à l'islamisme.

" Non seulement, continuent les deux écrivains, la politique américaine, soutenue par la droite religieuse chrétienne, a pour effet d'étendre l'emprise religieuse de l'islam mais elle contribue à diffuser un intégrisme sur lequel poussent les terroristes de demain, tel un cercle infernal promettant d'autres 11 septembre. "

Cette thèse manichéenne n'est pas nouvelle. Elle tend à voir d'un côté une masse musulmane soumise à l'islamo-terrorisme, de l'autre des États-Unis complices et artisans de leur propre perte. Intellectuellement, l'idée peut séduire, mais correspond-elle à la réalité ?

Il y a eu, c'est vrai, une période d'instrumentalisation, par les Etats-Unis, des réseaux islamistes. En Afghanistan, pendant la guerre contre les Soviétiques et, plus tard, un temps avec les Taliban.

Alors, les monarchies du Golfe, plus que d'autres les Saoudiens, ont de fait travaillé dans le même sens avec les Américains. Puis il y a eu le 11 septembre 2001. A ce moment, les autorités américaines ont révisé leurs conceptions.

Quant aux pays du Golfe, l'Arabie Saoudite surtout, ils sont devenus les cibles privilégiées des attaques terroristes. Résultat, aujourd'hui, ils collaborent sans état d'âme avec les services occidentaux à la chasse à l'islamo-terrorisme.

Structurellement, début mai 2004, les ministres de l'Intérieur des " Etats du Conseil de Coopération du Golfe " (CCG) avaient ratifié " un pacte antiterroriste " au Koweït. " Nous n'allons pas permettre à un groupe de pervertisseurs dirigé par de mauvais leaders de toucher à la sécurité et à la stabilité de ce pays, " le sien, avait déclaré le roi Fahd d'Arabie Saoudite le 20 juin 2004. Sans ambiguïté, il désignait les islamo-terroristes.

Abdel Rahman Al-Atiya, le Secrétaire général du CCG, mérite d'être écouté. Au moment de la signature du pacte, il expliquait : " Le danger du terrorisme s'accentue jour après jour avec l'absence totale d'une explication claire permettant de définir ses causes et ses buts... "


 Voilà le véritable dilemme. Pour lutter contre un danger, il faut en connaître les causes afin de les neutraliser. Or, " Tirs croisés, " comme beaucoup de thèses actuelles, s'efforce de nier le rôle moteur de la colère suscitée par les crises israélo-palestinienne ou irakienne. Faire endosser la responsabilité du terrorisme aux seuls pays du Golfe ne sert à rien. Ils sont nos alliés, il faut le comprendre, et non nos ennemis.


Jean Isnard
est consultant au
Centre de Recherches sur le Terrorisme depuis le 11 septembre 2001


" Tirs croisés, " Calmann-Lévy, 6,60 euros.

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