TENTATIVES SYRIENNES
DE DÉSTABILISATION
DU LIBAN ?

4 janvier 2007

Deux informations émanant de sources libanaises sont particulièrement inquiétantes. L'une concerne des militants salafistes qui s'introduisent dans un camp palestinien. L'autre, la découverte d'armes aux mains d'une organisation prosyrienne.

Première information : Au cours des derniers mois, un nouveau groupe, le " Fatah el Islam, " s'est implanté dans le camp palestinien de Nahr el Bared (à 15 km au nord de Tripoli, au Liban). Or, la plupart de ses membres ne sont pas Palestiniens.

Il faut savoir, l'armée et la police libanaises n'entrent pas dans les camps palestiniens. L'ordre y est assuré par la " Force de sécurité commune, " une structure palestinienne.

Vers la mi-novembre, cette dernière s'est inquiétée de la présence du "Fatah el Islam" dans le camp de Nahr el Bared. Elle a fouillé une maison, à la recherche de membres du groupe. Un certain Maher Abdel Hadi a été tué au cours d'affrontements armés. Ont été arrêtés Houssam Mohammad As-Syam, alias Abou Mohammad As-Souri, un Syrien, et Mohammad Saleh Salam, un Saoudien. Remis aux services de sécurité libanais, ils ont avoué être arrivés au camp de Nahr el Bared en juillet dernier (2006), au cours de la guerre entre Israël et le Hezbollah.

Depuis, et en dépit de l'opération de la " Force de sécurité commune, " le " Fatah el Islam " a pris le contrôle d'un autre groupe, palestinien lui, le " Fatah el Intifada (1), " et a confisqué ses bureaux dans le camp. Du même coup, l'organisation, d'idéologie laïque avant sa mutation, est devenue islamiste radicale.

Chaker Al Absi avec un groupe de ses combattants Fatah al Islam, Chaker el Absi avec des membres de son groupe

Le " Fatah el Islam " est commandé par un Palestinien d'une quarantaine d'années, Chaker Al Absi, alias Abou Al Hassanaiyn. Ancien responsable de la sécurité du " Fatah el Intifada, " il a rallié le " Fatah el Islam. " Il obéit aux ordres d'Abou Khaled Al-Imla, qui réside à Damas.

Ghol Agassi ou Gol Agassi alias Abou  al Qaaqaa (Kaakaa=Gol Agassi, alias Abou Al Qaaqaa,(photo) un ressortissant Syrien vivant à Alep, est aussi en relation avec eux.

Les Palestiniens affirment le groupe sans importance et ne disposant que d'une quarantaine d'hommes. Les observateurs les estiment, eux, s'élevant à 200 éléments.

Début décembre, une cinquantaine d'hommes sont venus en renfort de Syrie, pour certains après un séjour en Irak. La plus grosse partie d'entre eux était formée de Saoudiens et de Libyens.

Les membres du " Fatah el Islam " sont des salafistes et certains appartiendraient à Al-Qaïda. Néanmoins, beaucoup ont été entraînés en Syrie et n'ont d'Al-Qaïda que le nom. On les assimile à ce que les autorités libanaises appellent "l'Al-Qaïda syrienne." Autrement dit, des gens aux relations ambiguës avec Damas (voir l'interview de Ahmad Fatfat,ancien ministre de l'intérieur).

 

Seconde information : Le 21 décembre 2006, les FSI (police libanaise) ont effectué une perquisition aux domiciles de membres du PSNS (Parti social nationaliste syrien) (2) dans la région de la Koura, au nord du Liban. Équivalente à la charge de deux camions, une importante quantité d'armes et d'explosifs a été découverte.

Armes saisies
Une partie des armes saisies sur le PSNS

Cinq personnes ont été arrêtées, toutes membres du PSNS. L'opération a été montée sur renseignements et déclenchée sur réquisition du juge Saïd Mirza.

 

Conclusion : Il faut craindre une tentative de déstabilisation du Nord du Liban à l'instigation de la Syrie. Dans cette région, chrétiens et sunnites sont en effet globalement acquis au gouvernement en place.

Par contre, les camps palestiniens, une minorité des islamistes sunnites et les hommes du PSNS, en opposition avec le pouvoir en place, sont travaillés par Damas. On sent la volonté de la Syrie d'ouvrir un second front contre Beyrouth, après celui tenu par le Hezbollah au Sud.

 

Notes

(1) Le Fatah el Intifada est un groupe palestinien fondé au début des années 80 dans les camps palestiniens du Nord du Liban. Il est dirigé par Abou Moussa qui était en dissidence avec Yasser Arafat.

(2) Le PSNS a été fondé en 1932 par Antoun Saadé, un Libanais chrétien de confession grecque orthodoxe. Influencé par le modèle fasciste, il développe une idéologie laïque et souhaite la formation d'un État syrien englobant le Liban, la Palestine, dont le territoire d'Israël, la Jordanie et l'Irak. En 1949, son parti organise une insurrection contre le gouvernement libanais. L'affaire ayant échoué, Saadé se réfugie en Syrie mais les autorités de Damas le livrent à celles du Liban. Il sera jugé et exécuté le 8 juillet 1949. Le 16 juillet 1951, le PSNS assassine le Premier ministre libanais Riyad As-Solh (Riad Solh). Le 1er janvier 1962, le parti tente, en vain, un nouveau coup d'État. Le 14 septembre 1982, un membre du PSNS, Habib Chartouni, assassine Béchir Gemayel, le Président du Liban.

 

Centre de Recherches sur le terrorisme depuis le 11 septembre 2001
 www.recherches-sur-le-terrorisme.com

 

Lire aussi:
Fatalité libanaise, l'assassinat de Pierre Amine Gemayel (Pierre Gemayel Jr)
Un témoin syrien, Mohammad Zouheir Siddique, accuse Bachar el Assad d'avoir donné l'ordre de tuer Rafic Hariri
Explications sur la crise de pouvoir au Liban
 
 
Retour Menu
Retour Page Accueil